Dans un mouvement stratégique, Woodside, géant énergétique australien, a annoncé ce mercredi 16 octobre 2024 son retrait prochain de la bourse de Londres (LSE). Cette décision, justifiée officiellement par des faibles volumes de transactions et un désir de réduire les coûts administratifs, suscite des questions dans les milieux financiers et attire l’attention de certains analystes.
Zaynab Sangarè, Senegal
Avec seulement 1% de son capital social en circulation sur la LSE, la faible liquidité a été présentée comme une raison principale de cette sortie. Toutefois, certains observateurs se demandent si cette décision n’est pas liée à d’autres facteurs plus stratégiques. Dans un contexte où le secteur de l’énergie est confronté à une surveillance accrue, Woodside pourrait chercher à réduire son exposition aux régulations britanniques, considérées comme plus strictes que celles de l’Australie. L’entreprise a confirmé qu’elle avait déposé une demande auprès de la Financial Conduct Authority (FCA) britannique et de la LSE pour annuler sa cotation dans la catégorie des “sociétés commerciales internationales”. L’opération devrait être finalisée le 20 novembre 2024, date à laquelle les actions de Woodside ne seront plus disponibles sur le marché britannique.
Si l’argument de la réduction des coûts administratifs tient, cette sortie pourrait aussi permettre à Woodside de recentrer ses efforts sur le marché australien, où ses actions principales sont cotées à l’Australian Securities Exchange (ASX). Le maintien de son programme de reçus de dépôt américains (ADR) à la bourse de New York (NYSE) montre que Woodside conserve néanmoins un intérêt pour le marché nord-américain, potentiellement plus attractif. Les investisseurs européens devront réévaluer leurs options. Woodside a indiqué que Computershare (ndlr : son agent), fournira aux détenteurs d’intérêts de dépôt des informations sur les options de transfert vers l’ASX ou sur les modalités de vente de leurs parts. Certains actionnaires pourraient, toutefois, se tourner vers les ADR cotés au NYSE, une option jugée plus accessible par certains analystes.
Cette décision pourrait aussi être un signal pour d’autres grandes entreprises cotées à Londres. La question est désormais de savoir si cette stratégie pourrait être adoptée par d’autres groupes internationaux confrontés à une baisse de la liquidité sur le marché londonien.
Un rapport trimestriel révèle une production record de 53,1 MMboe et un chiffre d’affaires de 2 264,39 milliards de FCFA
Dans son dernier rapport trimestriel, Woodside Energy Group Ltd annonce une performance exceptionnelle, marquée par une production record de 53,1 millions de barils équivalent pétrole (MMboe) et un chiffre d’affaires atteignant 3,67 milliards de dollars, en hausse de 21% par rapport au trimestre précédent. Cette croissance est principalement impulsée par le projet Sangomar au Sénégal, ainsi que par une série d’acquisitions stratégiques qui renforcent l’expansion mondiale de l’entreprise dans les secteurs du gaz naturel liquéfié (GNL) et de l’ammoniac propre.
Le projet Sangomar a atteint sa pleine capacité de 100 000 barils par jour en juillet 2024, jouant un rôle central dans l’augmentation de la production trimestrielle. Ce dynamisme, couplé à la hausse des prix moyens du GNL, a permis à Woodside d’atteindre un chiffre d’affaires de 3,67 milliards USD. Cette croissance, bien qu’impressionnante, soulève des questions sur la durabilité des stratégies de prix et d’approvisionnement, dans un contexte de marché énergétique mondial instable. Dans une démarche vers une diversification énergétique, Woodside a investi 2,35 milliards USD dans un projet d’ammoniac propre au Texas, dont la production bas-carbone devrait démarrer en 2026. En outre, le rachat de Driftwood LNG, renommé Woodside Louisiana LNG, renforce la présence de l’entreprise sur le marché américain du GNL. Ces initiatives montrent une volonté de Woodside de s’inscrire dans la transition énergétique, mais la dépendance à des technologies non éprouvées reste un défi pour atteindre ses objectifs bas-carbone.
Un accident tragique en octobre au Texas souligne la nécessité pour Woodside de renforcer ses normes de sécurité sur ses sites. Par ailleurs, la décision de l’entreprise de se retirer de la bourse de Londres suscite des interrogations quant à sa stratégie de transparence financière à l’égard de ses investisseurs internationaux. Le rapport trimestriel de Woodside expose une stratégie d’expansion rapide, mais également les défis associés à cette croissance accélérée. Les projets en cours, bien qu’ambitieux, soulèvent des questions sur la capacité de l’entreprise à maintenir un équilibre entre rentabilité, durabilité et sécurité.
Zaynab Sangarè
(Afrik Management/ Octobre 2024)
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