Dans un contexte de transformation structurelle de son économie, le Sénégal place l’agriculture au centre de sa stratégie de développement à long terme. C’est dans cette dynamique que s’inscrit l’ambition de parvenir à l’autosuffisance en banane d’ici 2029, une orientation clairement réaffirmée par le ministre de l’Agriculture, de la Souveraineté Alimentaire et de l’Élevage, Dr Mabouba Diagne. Cette volonté s’aligne sur les objectifs de l’Agenda Sénégal 2050, cadre stratégique national qui vise à bâtir un pays souverain, équitable et prospère.

Malgré des conditions climatiques défavorables, la filière banane a enregistré des performances notables en 2024. La production locale a atteint 72 350 tonnes, contre 101 993 tonnes de consommation nationale. Seules 29 643 tonnes ont été importées, marquant un net recul de la dépendance extérieure. Sur la même période, près de 37 500 tonnes de pertes ont été enregistrées, soit un volume supérieur aux importations. Pour le ministre, cela prouve que l’autosuffisance est non seulement réalisable, mais déjà en cours de matérialisation. Durant les mois de pointe (septembre à décembre), les importations sont tombées sous la barre des 10 000 tonnes, pendant que la production nationale s’élevait à près de 40 000 tonnes.

Dans la perspective de 2025, l’État ambitionne une hausse significative avec une production projetée de 112 500 tonnes. Pour soutenir cet objectif, une stratégie coordonnée est en préparation. Des consultations ont été engagées avec les groupements d’intérêt économique (GIE) et les coopératives afin d’évaluer leurs besoins en vitro-plantes, condition essentielle à l’extension et à la modernisation des plantations.

Une réunion stratégique rassemblera dans les prochaines semaines les principaux acteurs de la filière dont le projet FSRP, la direction de l’horticulture, l’ISRA, le ministère du commerce, Senegindia et l’université Cheikh Anta Diop afin de co-construire un plan d’action opérationnel. Celui-ci reposera sur la recherche appliquée, la diffusion de pratiques agricoles modernes, la structuration des chaînes de valeur et la réduction des pertes post-récolte. Un atelier de haut niveau est également prévu en marge du sommet Africa food systems (AFS), pour finaliser la stratégie nationale pour l’autosuffisance en banane, avec la participation d’acteurs publics, privés, académiques et professionnels.

Cette initiative s’inscrit dans le cadre plus large de l’Agenda Sénégal 2050, qui fixe des objectifs ambitieux pour la souveraineté alimentaire et le développement rural. À l’horizon 2050, le gouvernement vise à réduire le taux de pauvreté de 37 % à 15 %, à positionner le pays parmi les 10 États les plus égalitaires du monde selon l’indice de Gini, et à faire progresser le PIB par habitant de 1 660 USD à plus de 4 500 USD. L’atteinte de ces objectifs passe notamment par le renforcement des agropoles régionaux, la transformation locale des produits agricoles, la montée en puissance des filières stratégiques, et la création massive d’emplois ruraux.

Le projet d’autosuffisance en banane apparaît donc comme un levier concret de cette transformation, illustrant la volonté de substituer progressivement les importations par une production nationale compétitive, durable et inclusive. Il s’agit d’un pas décisif vers une agriculture résiliente, capable de répondre aux besoins alimentaires du pays tout en contribuant activement à sa croissance économique.

Par Zaynab SANGARÈ