Les entreprises sont, pour la plupart, engagées dans la transformation numérique. Elles ont compris qu’il fallait prendre des sujets sensibles (les « pain point ») en essayant de les traiter différemment.
Elles ont compris que former les collaborateurs à la transformation numérique signifiait les accompagner dans une nouvelle culture, mettre en place un management bienveillant, adopter de nouvelles méthodes de travail, imaginer de nouveaux espaces et surtout développer de nouvelles compétences: les compétences numériques pour comprendre l’alphabet de cette nouvelle civilisation, les compétences d’agilité pour intégrer de nouvelles façons de travailler, les compétences de design thinking pour innover au quotidien et les compétence d’intelligence collective en valorisant la coopération plutôt que la collaboration.
Les entreprises s’organisent en mode agile
Ainsi, quels que soient leurs tailles, leur secteur d’activité, leur dimension publique ou privées, les organisations s’organisent en mode agile, font des POC, des MVP, favorisent le télétravail, les relations des collaborateurs avec de nouveaux écosystèmes internes ou externes. Elles s’inspirent des start-up pour innover et repenser leurs processus.
Nous avons étudié plus de 30 entreprises alors qu’elles menaient des transformations[2]. En quelques mots les résultats de nos recherches montrent trois tendances :
- Les transformations doivent être envisagées avec humilité sur de petits projets au départ, pour ensuite rentrer des cycles d’itération et de viralité.
- Les ambassadeurs sont des acteurs clés qu’ils faut savoir déceler et encourager pour qu’ils servent de rôles modèles dans la transformation des comportements au travail.
- Il ne faut pas confondre transformation numérique et innovation. La première concerne une évolution nécessaire de culture, posture et compétences. La deuxième a plus de chances de réussite à l’extérieur de l’organisation dans un incubateur par exemple. L’objectif étant de s’extraire des processus classiques, souvent invalidant pour en réinventer de nouveaux qui ne prennent en compte que le légal et les certifications en vigueur.
A la transformation numérique se rajoute la transformation de l’Intelligence Artificielle (IA)
A la transformation numérique, vient se rajouter une nouvelle transformation : celle de l’Intelligence Artificielle (IA). L’IA est un ensemble de techniques mathématiques et informatiques qui permettent de réaliser de nombreuses applications complémentaires comme la reconnaissance faciale, la vision par ordinateur, la compréhension du texte, la création de texte etc. L’IA n’est pas seulement un buzzword, c’est un ensemble d’outils, qui vont changer les pratiques dans de nombreux domaines comme la mondialisation, les modèles économiques, les alliances entre compétiteurs, les usages, la répartition des coûts, les nouvelles formes de travail et l’arrivée de nouvelles compétences[3].
Nos travaux de recherche nous amènent à identifier deux domaines de création de nouvelles compétences avec l’IA. Tout d’abord, les managers et les collaborateurs devront s’équiper en compétences spécifiques pour interagir avec les IA et acculturer leurs collaborateurs (cf schéma), mais également intégrer ce que je nomme les « compétences de centrage ». Il s’agit de l’attention, l’intention et la gestion du temps. Ces compétences sont celles qui seront le plus externalisées aux IA (mémoires et gestion du temps) ou détériorées par le « management de la notification » (attention) découlant de la mise en place des IA. Et pourtant il faudra absolument continuer à les exercer si on souhaite continuer à réfléchir et rester force de proposition par rapport aux nouveaux systèmes d’IA.
“Ce sera l’IA et moi”, un ouvrage de Cécile Dejoux à lire par tout manager
« Les compétences de centrage » sont la source de notre différenciation avec la machine et symbole de notre spécificité humaine. C’est tout ce travail de recherche que nous développons dans l’ouvrage « Ce sera l’IA et moi » (vuibert, 2020).
Ainsi, à l’ère du numérique et de l’IA, chacun de nous devra mettre en place de nouveaux équilibres professionnels en décidant ou acceptant les tâches à laisser faire aux IA et celles qu’il prendra en charge, en montant en compétences afin d’être « IA compatible » tout en développant ses « compétences de centrage », garante de sa nouvelle humanité. Copyright : C. Dejoux, « Ce sera l’IA et moi », Vuibert, 2020
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