Le paludisme demeure la première cause de consultation dans les centres de
santé au Togo. C’est aussi l’une des maladies les plus dangereuses au monde,
un tueur silencieux qu’il faut bouter hors des ménages, surtout en ces temps
d’hivernage. Pourtant, les stratégies de lutte contre la maladie connaissent
des limites du fait de la passivité des populations.
En cette période d’hivernage, il est fréquent de voir à travers les quartiers de la
capitale togolaise, des eaux stagnantes dans lesquelles se trouvent des
immondices. Ce sont les nids des anophèles. Ce qui crée une psychose au sein
de la population : les ménages sont menacés par le paludisme.
Kodzo, élève ne classe de quatrième en vacances à Gbadago, un vieux quartier
de Lomé, ne s’est pas réveillé comme d’habitude. Il grelotte. Il a une forte
fièvre. Prise de panique et désemparée, sa mère l’amène au centre de santé de
Tokoin. Le diagnostic est sans appel : il souffre du neuro palu ou accès
pernicieux, la forme la plus sévère du palu.
Comme Kodzo, d’autres enfants, même de bas âge, souffrent à travers le pays
du paludisme. Malgré les campagnes de sensibilisation, la distribution des
moustiquaires imprégnées, le mal persiste et tue, surtout les enfants.
Selon l'OMS, le paludisme tue plus de 400000 personnes chaque année et, en
2018, l'Afrique représentait 94% de ces décès. Les enfants de moins de 5 ans,
sont les plus à risque. L'UNICEF rapporte que toutes les 2 minutes, un enfant
meurt du paludisme. Et, cette maladie a touché en 2020 environ 241 millions
de personnes dans le monde et causé 627 000 décès.
De manière plus précise, « le paludisme a emporté, d’après les estimations,
619.000 personnes en 2021, contre 625.000 en 2020. On comptait quelque 247
millions de nouveaux cas de paludisme en 2021 contre 245 millions en 2020 «,
renseigne le Rapport 2022 sur le paludisme dans le monde.
Au Togo, le paludisme est la première cause d'hospitalisation et la première
cause de mortalité. Le ministère de la Santé, de l’Hygiène Publique et de l’Accès
Universel aux Soins affirme que le paludisme est «endémique avec une
transmission qui dure presque toute l'année sur tout le territoire national». En
d'autres termes, tout le pays est exposé au risque de paludisme, à tout
moment de l'année.
Des campagnes pour mettre fin au paludisme
Le sommet africain qui s’est tenu en avril 2000 à Abuja au Nigeria, avait pour
objectif de lancer l'initiative «Faire reculer le paludisme». L'OMS et les pays
africains se sont engagés à réduire de moitié les décès dus au paludisme en
Afrique.
L’engagement du Togo dans l’initiative « Faire reculer le paludisme » prend la
forme de trois grandes mesures: la prévention, l’accès au diagnostic et la
guérison. Pour mettre en œuvre ces mesures, le pays organise régulièrement
des campagnes nationales de distribution de moustiquaires imprégnées
d'insecticide de longue durée, ou moustiquaires de lit.
Ces moustiquaires sont suspendues au-dessus des lits pour protéger contre les
moustiques infectés. La dernière campagne, réalisée en 2020, a permis de
garantir que tous ceux qui avaient besoin d'une moustiquaire en avaient une.
D'autres mesures comprennent la fourniture gratuite de tests de diagnostic
rapide du paludisme et le traitement gratuit des cas graves par injection
d'artésunate et d'artéméther, dans les centres de santé publique.
Toutes ces mesures, financées par le Fonds mondial (fonds auquel participent
l'OMS et l'UNICEF), ont porté leurs fruits. Selon le Rapport mondial sur le
paludisme 2019, l'incidence du paludisme au Togo a diminué de plus de 25%
entre 2015 et 2018 et la mortalité a diminué de 8% sur la même période. Mais
la pandémie COVID-19 a rendu la campagne plus difficile.
À Bassar au nord du pays, le premier cycle de la campagne annuelle de la
chimio-prévention du paludisme saisonnier (CPS) a été lancé en juillet 2023.
Cette partie septentrionale du pays est retenue à la suite des analyses de
données de pluviométrie, de morbidité et de mortalité infantile liées au
paludisme.
L’activité initiée par le ministère de la Santé, s’inscrit dans le cadre du
programme national de lutte contre le paludisme. Elle s’adresse aux enfants de
03 à 59 mois. Les agents de santé ont pour mission de donner aux enfants
ciblés des comprimés de sulfadoxine-pyriméthamine associée à l’amodiaquine
sur une période de 03 jours pendant 04 mois soit 04 cycles de traitement.
Il est prévu que la campagne se déroule sous la forme du porte-à-porte pour
toucher le maximum d’enfants. Le travail est effectué sur le terrain par des
équipes spécialisées qui sont aidées par des agents de santé communautaires.
Les bénéficiaires seront prémunis contre les formes graves du paludisme, et
donc de parvenir à une réduction considérable du taux de mortalité infantile
pendant la période des pluies favorable à l’abondance des moustiques.
Elles permettent de doter les ménages de moustiquaires imprégnées
d'insecticide de longue durée. Une de ces campagnes qui s’est déroulée en
2020 a favorisé la distribution de 6,5 millions de moustiquaires. Parmi les
efforts de lutte contre la maladie, il y a aussi la gratuité depuis mai 2019 des
tests de diagnostic rapide du paludisme et le traitement des cas graves par
injection d'artésunate et d'artéméther dans les centres de santé publics.
18 millions de doses du vaccin
Dans cette lancée, 18 millions de doses du vaccin RTS,S/AS01 seront allouées à
12 pays africains pour la période 2023-2025. C’est la nouvelle qui défraye la
chronique depuis le 5 juillet 2023.
Le Bénin, le Burkina Faso, le Burundi, le Cameroun, le Libéria, le Niger,
l’Ouganda, la République démocratique du Congo et la Sierra Leone sont les
nouveaux pays où seront déployés les programmes de vaccination
antipaludique.
D’autres gouvernements dont celui togolais entendent leur emboîter le pas
portant à 28 le nombre actuel de pays africains ayant manifesté leur intérêt
pour recevoir ce vaccin.
Le vaccin RTS, S/AS01 est mis au point par le groupe pharmaceutique
britannique GSK. Un deuxième vaccin, R21/Matrix-M, mis au point par
l’Université d’Oxford et fabriqué par le Serum Institute of India (SII), devrait
également être préqualifié par l’OMS dans un futur proche.
« Ce vaccin a le potentiel de marquer un tournant dans la lutte contre le
paludisme et, s’il est largement déployé en parallèle d’autres interventions, de
prévenir des dizaines de milliers de décès chaque année », se réjouit Thabani
Maphosa (Directeur général de la mise en œuvre des programmes de pays à
Gavi, l’Alliance du vaccin).
Mais pour bon nombre d’observateurs, une forte campagne de sensibilisation
doit être menée, avant la distribution de ce vaccin dans les 12 pays.
Rappelons que le paludisme est une affection fébrile aiguë dû à des parasites
du genre Plasmodium. Il est transmis à l’homme par des piqûres de moustiques
infectés, appelés « vecteurs du paludisme ». Chez un sujet non immunisé, les
symptômes apparaissent généralement au bout de 10 à 15 jours après la
piqûre de moustique infectante. Les premiers symptômes (fièvre, céphalées et
frissons) peuvent être modérés et difficiles à attribuer au paludisme. S’il n’est
pas traité dans les 24 heures, le paludisme peut évoluer vers une affection
sévère souvent mortelle. Lorsqu’il est bien traité, la personne infectée guérit en
quelques jours. (AFRIK MANAGEMENT/AOÛT/2023)
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