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Pourquoi les hauts potentiels ne sont pas tous de futurs leaders ?

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Bien que valorisante en apparence, la qualification de « haut potentiel » pourrait entraver plutôt que favoriser l’épanouissement des collaborateurs.

Quand il s’agit d’humain, il est important de ne pas tomber dans les travers de la catégorisation à tout prix. Or aujourd’hui, la tendance est de compartimenter les individus : une case pour le manager bienveillant (et gare aux autres), une case pour le leader (c’est la décennie du « tous leaders »), une case pour le « haut potentiel », surdoué de l’entreprise, qui devra être tout cela à la fois.

L’un des nombreux défis qu’ont à relever les entreprises aujourd’hui est de parvenir à garder et faire évoluer les collaborateurs à fort potentiel, qui sont les moteurs de leur développement et de leur croissance. Dans cette optique, on définit souvent la notion, puis le profil type du haut potentiel en entreprise afin de créer un programme d’évolution, un formatage en règle pour tirer le meilleur du collaborateur identifié. Pour son bien ? Pour celui de l’entreprise ? Ou les deux ?

Le haut potentiel s’apparente au surdoué

Si l’on s’en tient au concept, le haut potentiel est celui qui se distingue par son leadership, celui qui sait « emmener avec lui », influencer positivement, et qui se montre à la fois force de proposition, innovant et intègre. Il dispose par ailleurs des compétences techniques ou des qualités requises pour atteindre les objectifs de l’entreprise. Et au-delà de tout cela, on perçoit en lui une capacité hors norme à en acquérir de nouvelles. En somme, le haut potentiel ressemblerait à s’y méprendre à l’image que l’on se fait d’un surdoué.

Or, on connaît la difficulté qu’ont eu les familles, le corps médical et les enseignants à comprendre les surdoués. Précocité, QI élevés, hypersensibilité à l’environnement… On a pointé la différence de ces hauts potentiels au point que ce qui devait être leur plus grand atout est devenu, dans de nombreux cas, un handicap. La catégorisation mène à cela : en soulignant la différence, on crée, plus qu’un privilège, une exclusion. Ne répétons pas ces erreurs à l’échelle de l’entreprise et de la société. Arrêtons d’enfermer le talent en voulant toujours le définir entièrement et l’encadrer.

Dire ouvertement à un collaborateur « tu es un haut potentiel » est en ce sens porteur de risques. Car le simple fait de le qualifier ainsi génère une attente ou, du moins, un besoin de comprendre : « Je suis un haut potentiel ? A quoi cela correspond-il ? Qu’est-ce que cela implique ? ».

Pour répondre à ces questions, quelle autre solution que de lui fournir une grille de lecture, une définition, un parcours ? Si une partie des collaborateurs verront dans un tel échange une approche valorisante ou une opportunité, si l’accès à cette catégorie d’élite peut être pour certains un « boost » pour l’égo, il sera pour d’autres une sentence. Ces derniers verront leur espace de pensée se réduire, rejetteront le statut qui leur a été attribué, et voudront se débarrasser de cette étiquette.

La liberté permet l’expression du potentiel

Il existe une variété innombrable de profils à fort potentiel ; nous sommes loin d’une définition unique ! Le haut potentiel n’est par exemple pas toujours le collaborateur le plus performant. Il est en revanche celui qui apporte un plus à l’entreprise grâce à un ressenti plus juste, une vision, des actions ou des méthodes qui le différencient des autres. Il est un talent qui, probablement plus qu’un autre, aura besoin d’opportunités et de projets pour s’exprimer et s’épanouir pleinement.

Contrairement aux idées reçues, il n’aspire cependant pas toujours à devenir leader ou à accéder à des postes élevés dans l’entreprise ; sa réussite peut se situer ailleurs (lire aussi la chronique : « A quoi juge-t-on la réussite ? »). On ne peut d’ailleurs imposer l’idée qu’il sommeille en chacun de nous un leader potentiel. Nous avons tous du talent ; le leadership n’en est qu’une expression. Et toute personne douée de leadership n’a pas pour ambition d’être un leader au sens où on l’entend.

Le haut potentiel peut donc être simplement celui ou celle qui anticipe les transformations à venir et qui sait partager ses idées et ses arguments dans l’entreprise. Il peut être celui ou celle qui suscite l’adhésion par son charisme et ses idées novatrices et qui pointe un danger tandis que d’autres courent avec enthousiasme vers le précipice.

Un collaborateur à fort potentiel est avant tout libre et libéré. Il incarne, parfois sans le savoir, l’agilité dont on parle tant. Ainsi, l’idée même d’un encadrement total équivaudrait à se priver de tout ou partie de son talent. Parce que leurs compétences et leurs personnalités sont des atouts majeurs pour l’entreprise, il est essentiel que les dirigeants et les managers soient en mesure d’identifier et de faire évoluer les hauts potentiels qui les entourent sans créer de biais ou de frustration. Il s’agit aujourd’hui de faire grandir ces profils « différents » avec ce qu’il faut de discernement.

Par Isabelle Bastide

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