Economie & Finances

SÉNÉGAL : ENTRE DYNAMISME ÉCONOMIQUE ET DÉFIS STRUCTURELS- BILAN BUDGÉTAIRE À MI-PARCOURS 2025

0

DAKAR, août 2025 – Le dernier rapport d’exécution budgétaire du Sénégal, publié hier par le ministère des Finances et du Budget, dresse un état des lieux contrasté de la situation financière du pays au terme du deuxième trimestre de l’année. Dans un contexte marqué par l’exploitation des ressources pétrolières et gazières, la croissance économique nationale affiche une vigueur remarquable, bien que le tableau budgétaire révèle certaines fragilités structurelles. Ce document, élaboré conformément aux lois sur la transparence financière et la reddition de comptes, s’inscrit dans une dynamique de gouvernance publique plus ouverte et responsable.

Sur le plan macroéconomique, le Sénégal continue de bénéficier d’un environnement régional plutôt favorable. Au sein de l’UEMOA, la croissance a atteint 7,1 %, portée par la reprise économique post-pandémie. À l’échelle nationale, la croissance du PIB réel s’est élevée à 12,1 % au premier trimestre, essentiellement stimulée par le début de l’exploitation des hydrocarbures. Hors secteur pétrolier et gazier, cette croissance aurait été limitée à 3,1 %, soulignant la dépendance croissante de l’économie sénégalaise à ses nouvelles ressources extractives.

Les recettes budgétaires du pays progressent globalement, atteignant 2 226,3 milliards de francs CFA à fin juin 2025, soit un taux de recouvrement de 47,7 % des objectifs annuels. Cette performance, en hausse de 8,5 % sur un an, résulte de la reprise économique et des efforts accrus des services de recouvrement. Les impôts directs, notamment l’impôt sur les sociétés, affichent de bons résultats, tandis que les impôts indirects continuent d’alimenter une part importante des recettes. Toutefois, la mobilisation des dons budgétaires reste extrêmement faible, avec seulement 19,3 milliards de francs CFA enregistrés à mi-parcours, représentant à peine 8 % des prévisions annuelles. Ce déficit de financement extérieur, notamment en dons en capital, interpelle sur la fiabilité des appuis extérieurs traditionnels.

Du côté des dépenses, le budget général a été exécuté à hauteur de 2 814,6 milliards de francs CFA, soit 41,9 % des prévisions de la Loi de Finances Rectificative. Les dépenses de fonctionnement dominent largement, avec une exécution à 50,4 %, tirée par une forte progression des transferts courants. Les subventions à l’énergie, qui ont plus que doublé par rapport à l’an dernier, atteignent désormais 370 milliards de francs CFA, traduisant la pression budgétaire croissante liée à la régulation des prix dans un contexte de volatilité énergétique. Les charges de la dette s’élèvent à 501,1 milliards de francs CFA, dont une majorité liée à l’endettement extérieur, tandis que les dépenses de personnel progressent légèrement pour atteindre 724,1 milliards.

En revanche, l’exécution des dépenses d’investissement reste modeste. À mi-année, seuls 30,1 % des crédits ont été engagés, avec une performance particulièrement faible sur les projets directement gérés par l’État. Cette lenteur est partiellement expliquée par le calendrier d’exécution des travaux publics, souvent concentré au second semestre, mais elle pose également la question de la capacité institutionnelle à absorber efficacement les crédits d’investissement. Les transferts en capital se concentrent principalement sur les affaires économiques, incluant un soutien important à la campagne agricole.

Le déficit budgétaire s’élève à 588,3 milliards de francs CFA, soit 34,7 % de l’objectif annuel. Cette situation, qualifiée de “relativement maîtrisée” par le rapport, a été financée par un recours important aux marchés financiers et bancaires, pour un total de 2 247,8 milliards de francs CFA. Les charges de trésorerie ont été couvertes à hauteur de 1 490,4 milliards, principalement pour l’amortissement de la dette et l’apurement des arriérés extérieurs, traduisant une gestion de la dette publique orientée vers le maintien de la solvabilité de l’État.

Parallèlement, le fonds national de retraite enregistre un excédent de 13,2 milliards de francs CFA, porté par une augmentation des cotisations. Toutefois, les organismes publics autonomes, qui gèrent un budget global de près de 1 460 milliards, affichent un taux d’exécution budgétaire globalement faible, notamment en matière d’investissements. Leur endettement global, concentré sur quelques entités clés comme le fonds d’entretien routier, continue de soulever des inquiétudes.

Dans l’ensemble, le rapport d’exécution budgétaire du deuxième trimestre 2025 démontre les progrès réalisés dans la mobilisation des recettes fiscales et la gestion du déficit, mais il souligne aussi des vulnérabilités persistantes. Le retard dans l’exécution des investissements publics, la dépendance accrue aux ressources extractives et la hausse des subventions aux secteurs sensibles, comme l’énergie, constituent autant de défis que les autorités devront gérer avec prudence. À mi-parcours, le Sénégal avance dans sa transformation économique, mais l’équilibre entre croissance, soutenabilité budgétaire et équité sociale reste fragile.

Par Zaynab Sangarè 

admin
Soutenez votre média indépendant de management : abonnez-vous à Afrik Management au service des individus et des organisations ! À 15 €/An A compter de février 2024, accédez à des contenus exclusifs sur et naviguez pour 15 € par an seulement ! Notre mission en tant que média de management ? Rendre le savoir accessible au plus grand monde. Nous produisons chaque jour nos propres articles, enquêtes et reportages, le tout à taille humaine. Soutenez-nous dans cette démarche et cette ambition.

Transformation agricole au Sénégal : la filière banane au cœur de la stratégie de souveraineté économique

Previous article

Pays riches, pays pauvres : Comment les exonérations fiscales accordées aux multinationales privent le Sénégal, de services publics essentiels

Next article

Commentaires

Leave a reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

You may also like