Des études suggèrent que se livrer à des activités a priori improductives sous la forme de petit exercices pourrait bien, en réalité, être une façon intelligente de passer son temps, en particulier au travail.
En tant que conceptrice de jeux vidéo, je suis régulièrement accusée d’inciter les gens à perdre leur temps. Et pour cause : dans le monde, nous passons 7 milliards d’heures chaque semaine à jouer à des jeux vidéo – dont Angry Birds, à raison de 300 millions de minutes par jour ! –, sans en avoir apparemment rien retiré.
Mais des études suggèrent que se livrer à des activités a priori improductives sous la forme de petit exercices pourrait bien, en réalité, être une façon intelligente de passer son temps, en particulier au travail. De telles pratiques peuvent nous rendre plus débrouillards, plus coopératifs et plus persévérants quand les choses se compliquent. En d’autres termes, elles peuvent nous rendre plus résilients. C’est pourquoi je mets un point d’honneur à gaspiller au moins quatre minutes de mon temps toutes les heures.
J’ai commencé à m’intéresser au thème de la résilience après être restée clouée au lit trois mois à la suite d’un traumatisme crânien. J’avais ordre de laisser mon cerveau se reposer : pas d’e-mails, pas d’écriture, pas de course à pied. J’allais me coucher tous les soirs avec l’impression d’avoir perdu ma journée et cela me rendait anxieuse et déprimée. J’ai réalisé que cette oisiveté finirait par me rendre dingue, à moins que je revoie ce que «être productif» voulait dire pour moi. J’ai identifié des activités susceptibles d’accélérer ma guérison – des petites choses qui me rendaient heureuse, connectée et créative.
Quand je me suis sentie mieux, je me suis demandée pourquoi certaines occupations en apparence totalement inutiles, comme regarder des photos de bébés animaux ou me promener dans le quartier, étaient celles qui m’avaient le plus aidée. J’ai alors commencé à dévorer les travaux de recherche sur la résilience, une thématique qui touche aux neurosciences, à la médecine et à la -psychologie. J’ai appris que la capacité à rebondir après un choc revêt quatre aspects : physique, mental, émotionnel et social. Chacun de ces aspects peut être renforcé grâce à des activités en apparence inutiles.
Comme vous vous en doutez peut-être, la dimension physique est essentielle, parce qu’elle permet à votre cœur, vos poumons et votre cerveau de réagir efficacement aux situations stressantes. De plus en plus, les scientifiques s’accordent à dire qu’une vie sédentaire est ce qui vous empêchera en -premier lieu d’encaisser les coups durs. Leur conseil : levez-vous, et faites au moins quelques pas toutes les heures.
Les recherches montrent aussi que notre volonté se renforce quand on l’exerce. S’attaquer à une tâche inutile mais relativement difficile, comme par exemple claquer des doigts cinquante fois d’affilée ou compter à rebours de 7 en 7 à partir de 100, est un moyen scientifiquement prouvé d’améliorer sa concentration et sa détermination – et donc sa résilience mentale. Plus la tâche est arbitraire, mieux c’est : en l’absence de motivations extérieures, seule compte votre volonté d’y arriver.
Pour avoir moins peur de l’échec et être plus disposé à utiliser différentes stratégies, tâchez d’éprouver, en moyenne, trois émotions positives pour chaque émotion négative au cours d’une même journée. Les scientifiques appellent cela le ratio «3:1». Contempler un adorable bébé animal ou faire un bon score sur Angry Birds sont autant de moyens de faire grimper ce ratio.
Enfin, l’aspect social de la résilience recouvre les relations qui nous aideront à trouver des ressources en cas de besoin. Des études sur les effets de la gratitude et du toucher insistent sur l’importance de cultiver des liens. Envoyez un mot de remerciement une fois par jour, par e-mail, chat ou SMS. Quand vous serrez une main, maintenez la pression un peu plus longtemps. Au bout de six secondes, le taux d’ocytocine dans votre sang et celui de votre collègue augmenteront – or des niveaux élevés d’ocytocine ont été associés au sentiment de confiance.
En renforçant ainsi votre résilience, vous améliorerez l’ensemble de vos capacités et votre entreprise y trouvera aussi son compte. Alors, mettez au point votre propre méthode – jouez, pourquoi pas – afin de construire votre résilience jour après jour. Je serai ravie de vous avoir fait perdre votre temps.
Par Jane McGonigal
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