Management & RH

Comment mesurer l’inclusion en entreprise

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Il y a une semaine, une dizaine d’organisations publiaient un baromètre RSE des entreprises qui révélait une prise de conscience des enjeux globaux liés à l’environnement mais une faiblesse concernant l’inclusion. Un constat également porté par Fanny Picard et Stéphanie Goujon, qui reconnaissent un manque d’action des entreprises pour les enjeux sociaux. La situation évolue néanmoins petit à petit. Pour espérer changer la situation, « il est d’abord nécessaire de faire un état des lieux pour savoir d’où l’on part et comment on peut progresser »  , insistent Patrick Scharnitzky et Pete Stone, de l’Association française des Managers de la Diversité (AFMD).

Cette dernière a collaboré avec 13 organisations et grandes entreprises — AFD, Adecco, APRR, Bouygues Construction, INRAE, KPMG, MBS, Nestlé, le groupe Renault, Orange, Servier, Zara et l’université de Lorraine — pour développer un outil capable de mesurer le caractère inclusif d’une entreprise. Avant d’entrer dans le vif du sujet, une précision s’impose. La mesure de la diversité correspond à la visualisation statique des origines socio-démographiques dans l’entreprise tandis que le caractère inclusif des entreprises “prend en considération la posture de l’entreprise pour faire vivre et infuser les actions prises”. 

Les multiples dimensions de l’inclusion

Mesurer l’inclusion signifie « aborder cette question de façon transversale, par les sujets et non par des populations choisies. La mesure du ressenti des discriminations participe à la mesure de l’inclusion mais cette dernière doit également comprendre l’évaluation d’actions transversales qui s’adressent à tous et à toutes » , soulignent les deux rapporteurs. La méthode développée par l’AFMD repose sur la prise en compte de 5 dimensions :

  • L’équilibre unicité et partage (inclusion identitaire) : cette notion comprend deux dimensions : l’adhésion des salariés à la culture et aux valeurs de l’entreprise et la reconnaissance de chaque salarié pour son apport dans la société.
  • La transversalité des actions (inclusion systémique) : si on travaille en silo par typologie de population, le risque est de créer des frustrations entre les populations. Pete Stone propose, par exemple, de travailler sur le problème de l’auto-censure au sein de toute l’entreprise, qui permettra de traiter à la fois des enjeux liés au handicap invisible, au plafond de verre pour les femmes ou encore à la liberté pour les LGBTQI+ de parler de leurs conjoints.
  • L’équité et le sentiment de justice (inclusion éthique) : au-delà de l’absence de discrimination établie, il faut être attentif au sentiment de discrimination ressenti par les salariés de l’entreprise. Si ce dernier existe dans l’entreprise, cela signifie qu’il y a un problème dans l’entreprise.
  • La coopération intégrative (inclusion collective) : l’entreprise doit jouer un rôle actif dans le développement de solutions favorisant la coopération et la liberté de parole.
  • La neutralisation des stéréotypes (inclusion relationnelle) qui est un prérequis à toute démarche d’inclusion.

« Ce ne sont pas tant les actions mises en place qui comptent mais plutôt la consonance des actions menées dans au sein de ces dimensions qui va permettre de renforcer le bien-être des salariés » , et par effet domino, « la performance de l’entreprise » , souligne Patrick Scharnitzky.

Analyser tous les pans de l’entreprise 

« Alors que le sujet de la diversité est très longtemps resté (et demeure souvent) cantonné aux services RSE/RH, l’inclusion envisage tous les acteurs et toutes les actrices ainsi que toutes les parties prenantes des organisations, à tous les niveaux de la hiérarchie » , met en avant l’AFMD. Ces cinq dimensions de l’inclusion doivent être mesurer à tous les échelons de l’entreprise, du côté de la gouvernance, des managers et des salarié

 

Les domaines dans lesquels l’analyse de l’inclusion doit être effectuée sont les suivants :

  • La gouvernance, les valeurs et la stratégie : les choix faits au sommet de la hiérarchie pour rendre la société plus inclusive.
  • Le management et les relations interpersonnelles : les managers sont en première ligne de la progression de l’organisation vers davantage d’inclusion.
  • La communication : elle constitue un point essentiel avec un éparpillement des salariés dans les murs et hors les murs de l’entreprise. Le top management doit présenter ce qu’il met en oeuvre pour que les salariés puissent s’en emparer et parler librement.
  • Le pilotage et la sensibilisation : il s’agit ici d’évaluer la façon dont les acteurs et les actrices des ressources humaines sont outillés pour mettre en place une stratégie d’inclusion.

Forts de toutes ces réflexions, l’AFDM et ses partenaires ont alors réalisé un questionnaire scindé en deux parties : la première centrée sur les intentions et actions mises en oeuvre (25 questions), était destinée aux responsables diversité et inclusion et RH, la seconde portant sur l’impact des actions et donc le ressenti (75 questions) était destinée aux salariés. À la fin de l’étude, les répondants étaient invités à indiquer leur âge, leur genre, leur ancienneté dans l’entreprise, leur statut mais aussi leur sentiment d’appartenance à un ou plusieurs groupes incarnant la diversité, ce qui a permis de classer par la suite les réponses par catégorie. Ce système permet, à la fin, de distinguer le ressenti global des personnes faisant qui se sentent incarner la diversité mais aussi des femmes ou encore des jeunes. Mais il ne permet pas d’entrer dans une véritable granulité sur le sujet puisqu’aucune question ne porte précisément sur une communauté.

La lutte contre les stéréotypes à la traîne  

Ce questionnaire a été proposé en bêta-test dans les organisations participant au groupe de travail, où il permis de récolter plus de 3000 réponses complètes.

Concernant les actions et les intentions, on observe que 82% des interrogés estiment que des actions ont été mises en place pour créer un équilibre partage / unicité au sein de la société. Cependant, ce chiffre élevé doit être nuancé. « Les entreprises se focalisent souvent sur la notion de partage dans l’entreprise » et donc l’adhésion à des valeurs mais pas encore assez sur celle d’unicité, notent les deux rapporteurs. A contrario, les actions menées dans le cadre de la lutte contre les stéréotypes sont insuffisantes — 30% seulement des sociétés en mènent —  car c’est un sujet longtemps resté tabou qui nécessite, de surcroît, de « dépasser la posture réglementaire » pour aller plus loin.

La gouvernance de l’entreprise s’estime très active (84%) dans le lancement d’actions. On note néanmoins une faiblesse au niveau de la communication qui doit désormais s’emparer de ces sujets et devenir beaucoup plus représentative. Aujourd’hui, les campagnes de communication, en interne comme en externe, ne peuvent plus être genrées mais doivent être à l’image de l’entreprise.

Concernant l’impact des actions, les bêta-tests révèlent un bon sentiment de justice et d’équité au sein des entreprises (85%) mais des difficultés concernant la transversalité des actions menées (56%) et la neutralisation des stéréotypes (60%). Ces résultats font ainsi parfaitement écho au manque d’actions menées au niveau des RH et du management.

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