Organisation

Créer un avenir partagé dans un monde fracturé grâce à la diversité

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La diversité, loin d’être acquise au sein des entreprises mondiales, est pourtant l’un des fondamentaux de la performance.

« Créer un avenir partagé dans un monde fracturé », tel est le thème du Forum économique mondial 2018, à Davos. Face à une société mondiale en proie aux crises identitaires et au repli sur soi (le Brexit en Europe et la fin de la participation américaine à l’accord de libre-échange avec les pays riverains du Pacifique en sont des exemples, parmi tant d’autres), le monde des affaires ouvre au contraire le débat sur le rôle de la diversité dans la performance et dans l’accélération des entreprises. D’ailleurs, le 48e Forum économique mondial est présidé exclusivement par des femmes. Mais où en est-on vraiment au matière de diversité au sein des équipes dirigeantes et des conseils d’administration ?

Des données alarmantes

Renforcer la diversité au sein des postes de direction exige pour les entreprises d’ériger la diversité en priorité stratégique et de démontrer ses avantages en termes de performance de l’organisation. Or, cela est encore loin d’être une évidence pour une partie des fonctions dirigeantes en place.

C’est ce que montre une étude publiée par PwC en 2017 : plus de 40% des administrateurs pensent que la diversité au sein de leur conseil n’améliore pas les résultats de l’entreprise, et plus de la moitié jugent le conseil déjà suffisamment diversifié (lire aussi l’article : « Diversité et myopie »). Et près d’une personne interrogée sur six (16%) pense que la diversité au sein du conseil n’a présenté aucun avantage pour l’organisation. Nous pensons au contraire que ces données alarmantes soulignent la nécessité de maintenir la question de la diversité au premier plan des priorités des conseils.

Aujourd’hui, nous constatons que lorsqu’il s’agit de nommer de nouveaux membres des conseils d’administration, ils sont souvent désignés parmi d’anciens administrateurs, P-DG ou directeurs financiers – ce qui tend à limiter l’accès à ces postes aux femmes et aux étrangers. Ainsi, P-DG et directeurs financiers confondus ont représenté près de 66% des nominations d’administrateurs en 2016 et, pour la première fois en sept ans, le pourcentage de femmes nommées aux conseils d’administration des entreprises du Fortune 500 a reculé (27,8% de nouvelles nominations d’administratrices). Ainsi, les projections indiquent désormais que la parité au sein de la nouvelle génération d’administrateurs ne sera pas atteinte avant 2032 (lire aussi la chronique : « Pourquoi la parité ne peut plus attendre »). Avec 421 sièges vacants ou nouvellement créés pourvus au sein des sociétés du Fortune 500 en 2016, les entreprises ont raté l’occasion de prendre à bras le corps la problématique de

Et il n’y a pas que dans les conseils d’administration que la question fâche. De même, les femmes P-DG se font toujours rares à l’échelle mondiale. Aux Etats-Unis, en France, au Royaume-Uni et en Allemagne, les femmes continuent d’être sous-représentées à des postes de direction. Aux Etats-Unis, en 2016, les femmes représentaient 8% du nombre total de P-DG des 100 premières entreprises du Fortune 500. Au Royaume-Uni, le pourcentage de femmes P-DG a certes augmenté d’un point en 2016, pour passer à 6%, mais la part totale reste mince. Sans parler de la France et de l’Allemagne, où la proportion de femmes P-DG est respectivement de 2 et 1%.

Cela n’empêche pas les lignes de commencer à bouger, doucement. Malgré des pourcentages faibles, les Etats-Unis comptaient, en 2017, un nombre record de 32 femmes P-DG au sein du Fortune 500. Parmi elles, Geisha Williams, latino-américaine à la tête de PG&E, et Indra Nooyi, indo-américaine, P-DG de PepsiCo.

Une belle transition vers la problématique des minorités ethniques, également largement sous-représentées dans le top management. Une véritable erreur étant donné leur poids croissant dans la population active. Aux Etats-Unis, au sein du Fortune 500, 73% des cadres dirigeants – hommes et femmes confondus – sont caucasiens, 21% sont asiatiques, 3% latino-américains, 2% afro-américains…

La diversité n’est donc pas acquise au sein des entreprises mondiales. Loin s’en faut. Mais il ne faut pas se contenter de ce constat. Il faut au contraire faire changer les mentalités, et vite. Car la diversité n’est pas qu’une question de bon sens et de responsabilité. Elle est aussi l’un des fondamentaux de la performance et de la survie des organisations dans un monde en pleine mutation.

Selon une étude d’EY et du Peterson Institute for International Economics, compter 30% de dirigeantes va de pair avec une augmentation des bénéfices nets de un point de pourcentage par rapport aux entreprises n’ayant recruté aucune femme à des postes de direction, soit une hausse de la rentabilité de 15%. Dans la même logique, un rapport du Credit Suisse de 2016 a mis en évidence une corrélation entre diversité hommes-femmes, rendements boursiers et rentabilité de l’entreprise. Les entreprises où les femmes représentent plus de 15% des cadres dirigeants ont été 50% plus rentables que celles où les femmes en représentent moins de 10%.

Selon les données de Catalyst, les entreprises qui maintiennent une forte proportion de femmes au sein de leur conseil d’administration – cette proportion étant définie comme au moins trois femmes siégeant au conseil durant au moins quatre ans sur cinq – affichent des résultats largement supérieurs aux autres : + 84% en termes de marge d’exploitation, + 60% en rentabilité des capitaux investis et + 46% en rentabilité des capitaux propres.

Ainsi, la diversité, sur tous les plans, est un gage essentiel de performance des organisations. Il est temps que les dirigeants aillent chercher, pour constituer leurs conseils d’administration, des profils en dehors des fonctions de direction. Cadres supérieurs, universitaires, entrepreneurs… Nul besoin d’être P-DG ou directeur financier pour apporter de la valeur à un conseil (lire aussi la chronique : « A quoi ressembleront les conseils d’administration de demain ? »). De même, les conseils d’administration principalement composés d’hommes ont tout particulièrement intérêt à développer et à entretenir dès à présent un réseau actif de candidates, et à élargir leur vivier. En outre, les entreprises doivent veiller à inclure dans leurs plans de succession des femmes comme des hommes.

Par Hervé Borensztejn,Muriel Moreau

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