Les contenus sponsorisés ou partenariats rémunérés sont de plus en plus encadrés par la loi et les influenceurs se doivent de respecter certaines règles.
6 influenceurs sur 10 ne respectent pas la loi, a constaté début 2023 la DGCCRF (direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes). Dans la majorité des cas, ces anomalies vis-à-vis de la réglementation concernent « les règles relatives à la transparence du caractère commercial des publications ». Autrement dit, le public n’était pas clairement informé que telle ou telle publication relevait d’un partenariat rémunéré.
Depuis, les autorités françaises ont décidé de passer à la vitesse supérieure, en adoptant une loi, mais aussi une politique de name and shame visant à citer et afficher publiquement les comptes de créateurs n’ayant pas respecté la loi. À ses origines laissé à son libre cours, le partenariat rémunéré est une activité désormais encadrée. De nombreuses règles ont été mises en place pour ne pas tromper le consommateur, qu’il s’agisse de la visée commerciale et publicitaire d’un post, ou de la qualité et de l’origine du produit vendu ou promu.
Partenariat rémunéré : ce que la loi impose aux influenceurs
Le Gouvernement, par l’intermédiaire du ministère de l’Économie, a publié un « guide de bonne conduite des influenceurs ». Dans celui-ci, les règles concernant les droits et les devoirs des créateurs de contenu en matière de partenariats rémunérés sont clairement édictées. Si vous êtes influenceur, voici vos devoirs.
Obligation d’indiquer l’intention commerciale de vos publications
C’est l’un des éléments principaux de la réglementation sur les pratiques commerciales des influenceurs. Et c’est souvent pour un manquement à ce point précis que les créateurs de contenu subissent le courroux des autorités. En effet, « si votre publication ou contenu vise à promouvoir un bien ou un service et si vous avez bénéficié d’une contrepartie pour sa diffusion », vous devez absolument le mentionner.
Votre audience doit connaître le caractère commercial de votre contenu. Pour cela, l’ajout d’une mention « publicité », « partenariat rémunéré » ou « collaboration commerciale » est nécessaire. La mention « ad » n’est pas comprise dans cette liste, puisque peu compréhensible pour les non anglophones. Cette mention doit être visible sans avoir à cliquer ou à scroller. Il faudra également clairement identifier l’annonceur ou la marque. Certaines plateformes ajoutent d’ailleurs une fonctionnalité à cet effet.
Obligation d’un argumentaire vrai et vérifiable
Bien sûr, en tant qu’influenceur, vous vous devez de vous assurer que le produit ou service que vous promouvez n’est pas fictif. Vous pouvez en vanter les mérites, mais tous vos « arguments et promesses commerciales doivent être vrais et vérifiables ». Si vous ne pouvez justifier d’une qualité (« made in France » ou « 100 % naturel » par exemple), de gains ou de résultats (« bon pour la santé », « -10 kg en un mois » ou « gagnez 5 000 € » par exemple) d’un bien ou service, vous avez l’interdiction totale d’utiliser de tels arguments de vente. Toute fausse allégation est considérée comme une pratique commerciale trompeuse.
De la même manière, dire d’un produit ou service qu’il « augmente les chances de gagner aux jeux d’argent ou de hasard » est interdit. Enfin, en ce qui concerne les protocoles ou prescriptions thérapeutiques, il n’est pas possible d’utiliser un argumentaire comparant deux traitements ou méthodes, préférant ou substituant l’un à l’autre.
Interdiction de promotion de produits et services
Certains services ou produits sont purement et simplement exclus de la sphère publicitaire. Sur internet, les mêmes règles qu’ailleurs s’appliquent. La promotion des produits suivants en strictement encadrée :
- Actifs numériques (crypto-actifs, etc.),
- Jeux de hasard et d’argent,
- Boissons alcoolisées,
- Médicaments à usage humain,
- Dispositifs médicaux.
La promotion de ces produits et services est totalement interdite :
- Produits de contrefaçon,
- Tabac et produits du tabac, cigarette électronique et produits de nicotine,
- Médicaments soumis à une prescription médicale,
- Produits financiers dits risqués (pour lesquels on peut perdre une partie ou la totalité de son argent),
- Abonnements à des conseils ou pronostics sportifs.
Réglementation concernant le dropshipping
Le dropshipping est une pratique qui consiste à vendre sur Internet, sans que le vendeur soit en charge de l’expédition de la marchandise. Bien que le créateur de contenu ne se charge pas de l’expédition, c’est bien lui qui est considéré comme le vendeur. Il est responsable vis-à-vis de l’acheteur. L’influenceur doit donc s’assurer que :
- Les produits sont conformes à la législation applicable,
- Les produits ne sont dangereux ni pour les adultes, ni pour les enfants le cas échéant, et qu’ils ne sont pas interdits,
- Les produits sont disponibles, licites et ne sont pas contrefaits,
- L’acheteur est informé de l’identité réelle du fournisseur, si ce n’est pas vous,
- Les détails des produits sont affichés (prix, taille, composition, etc.), ainsi que leurs conditions de vente (modalités de paiement, délais de livraison, etc.),
- Les droits de rétractation du client sont respectés.
Obligation de mention des retouches photo et vidéo
En adoptant la loi relative à l’encadrement de l’influence commerciale, le gouvernement a mis en place de nouvelles directives concernant les retouches photo et vidéo. La mention obligatoire de retouches – « image retouchée » par exemple – qui se limitait aux photos de mannequins utilisées pour les campagnes publicitaires est désormais également applicable au contenu des influenceurs. Autre évolution, « les photos, vidéos et les représentations d’une silhouette ou d’un visage créé par une intelligence artificielle devront indiquer la mention ‘‘image virtuelle’ ».
Réglementation relative aux mineurs
Certains influenceurs, notamment dans les domaines du lifestyle ou de la parentalité, utilisent l’image d’enfants mineurs dans le cadre de promotions commerciales. Le code civil précise que « si vous êtes titulaire de l’autorité parentale, vous êtes tenus d’assurer la sécurité de votre enfant ainsi que de respecter son image et sa vie privée ». Selon « son âge et son degré de maturité, vous devez l’associer aux demandes qui le concernent ».
Parallèlement, la loi du 19 octobre 2020 encadrant l’exploitation commerciale de l’image d’enfants de moins de 16 ans sur les plateformes en ligne s’applique désormais aussi aux influenceurs. Enfin, les opérateurs de plateformes en ligne ont signé en 2022 une charte visant à « promouvoir l’information et la protection des utilisateurs s’agissant de la diffusion de l’image de mineurs ». Elle est consultable à cette adresse.
En tant qu’influenceur, quels sont mes droits ?
Les influenceurs n’ont pas que des devoirs, ils ont aussi des droits, comme tout citoyen. Certains s’appliquent à tous les utilisateurs de réseaux sociaux, d’autres uniquement aux influenceurs réalisant des partenariats rémunérés.
Contenus protégés juridiquement et droits d’auteur
Si vous créez des contenus « originaux », vous êtes protégé par des droits moraux et patrimoniaux, qui s’inscrivent plus globalement dans les droits d’auteur. Vous pouvez ainsi « décider du principe, du moment et des modalités de la divulgation de votre contenu » comme de « la poursuite de sa circulation ». Il est également possible d’exiger une mention de votre nom à chaque utilisation du contenu et de réclamer que son intégrité soit respectée. Vous pouvez aussi autoriser ou interdire toute reproduction ou représentation.
En outre, il est possible que vous souhaitiez utiliser de la musique pour accompagner vos publications commerciales. Ici, les mêmes règles qu’ailleurs s’appliquent. S’il s’agit d’une musique originale que vous avez composée, écrite et interprétée, vous en êtes le propriétaire et décidez de sa diffusion. Sinon, si :
- La musique est tombée dans le domaine public, 70 ans à compter de l’année suivant le décès de l’auteur, son utilisation ne nécessite pas d’autorisation,
- La musique est commercialisée dans le cadre d’une licence libre de droits, alors son utilisation est autorisée selon les conditions fixées par la licence,
- La musique n’est pas libre de droits, l’autorisation de l’auteur et/ou des ayants droit est nécessaire et délivrée (ou non) à titre gracieux ou onéreux.
Contrats et recours à un agent d’influenceur
Avec le développement de l’influencing ont émergé les agences dédiées à cette activité. Représenter, à titre onéreux, des personnes physiques ou morales exerçant l’activité d’influenceur dans le but de promouvoir des biens, des services ou des causes est désormais défini par la loi. Si un créateur de contenu a recours à un agent, il doit conclure un contrat avec lui. Celui-ci doit contenir des informations telles que :
- L’absence de conflit d’intérêt entre l’influenceur et son agent,
- Le montant versé par l’annonceur pour la prestation de l’influenceur.
Dans le cadre de partenariats rémunérés, un contrat doit être signé avec l’annonceur directement ou par l’intermédiaire de l’agence d’influenceurs. Ce type de document offre une certaine liberté rédactionnelle, même si des bonnes pratiques sont à identifier. Il faut notamment :
- Présenter clairement les parties du contrat,
- Énoncer les engagements de chacune des parties (contenu à créer, droits sur ce contenu, etc.),
- Préciser la rémunération et/ou la cession de droits de propriété intellectuelle ou de droit à l’image,
- Identifier la loi applicable, qui sera nécessairement la loi française si l’opération a lieu sur le territoire français.
Que proposent les plateformes sociales pour les partenariats rémunérés ?
La responsabilité des réseaux sociaux où se tiennent des pratiques commerciales sponsorisées peut être engagée en cas d’abus ou d’actes frauduleux. Pour cette raison, mais également pour faciliter la tâche des créateurs et influenceurs, certaines d’entre elles mettent en place des fonctionnalités permettant l’identification facile et rapide d’une publication incluant un partenariat sponsorisé.
- Instagram : la plateforme reine de l’influence et des publications commerciales a mis en place une fonctionnalité permettant d’annoncer les partenariats. En remplissant les informations requises en amont de la publication, les posts, Stories, Reels ou directs afficheront la mention « Partenariat rémunéré » ainsi que le nom de la marque.
- Facebook : comme sur Instagram, Meta propose une fonctionnalité pour identifier le contenu de marque avant une publication. « Il est de la responsabilité des créateurs ou des éditeurs d’identifier la Page de leurs partenaires commerciaux lorsqu’ils publient du contenu de marque », précise Facebook. Une fois la page de la marque sélectionnée, celle-ci apparaît à côté du nom de votre profil et une mention « Partenariat rémunéré » est inscrite au-dessus du post.
- TikTok : le réseau social du moment a ajouté une option permettant de mentionner directement sous les vidéos la qualité commerciale et sponsorisée du contenu. En remplissant les critères, les mots « Partenaire rémunéré » seront présents dans la légende de la publication.
- Pinterest : en créant une Épingle Idée sur Pinterest, il est possible d’activer l’option Ajouter un partenariat rémunéré qui permet l’ajout d’un « partenaire de marque ». L’influenceur peut y chercher la marque à identifier avant de publier son contenu. Une fois celui-ci approuvé par la marque, la mention « Partenariat rémunéré » apparaîtra.
- YouTube : la plateforme propose d’ajouter « des placements de produits rémunérés, des sponsorings et des promotions ». « Si votre vidéo contient une communication de ce type, vous devez nous en informer afin que nous puissions transmettre cette information aux utilisateurs », précise YouTube. Une mention spéciale s’affichera durant les premières secondes de la vidéo, expliquant qu’elle « inclut une communication commerciale ». Vous remarquerez également que nombre de Youtubeurs professionnels commencent leur contenu par une phrase comme « Cette vidéo est sponsorisée par… ».
D’autres plateformes sociales acceptent les partenariats rémunérés ou contenus sponsorisés, mais n’offrent pas de fonctionnalités aux influenceurs précisant la nature du contenu. Toutes, en revanche, préviennent les créateurs des règles à respecter, comme sur Twitter par exemple. Et chaque réseau social a aussi son propre règlement, qu’il faut consulter en amont de toute pratique commerciale.
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