On avait déjà détecté l’existence d’un milieu circumgalactique autour de chaque galaxie par son effet d’absorption sur la lumière des lointains quasars, ces trous noirs supermassifs ultrabrillants, car accrétant violemment de la matière. On réalise aujourd’hui que ces milieux, mais aussi, les galaxies qui leur sont associées, sont bien plus grands qu’on ne le pensait, de sorte que deux grandes galaxies comme Andromède et la Voie lactée seraient en fait matériellement connectées !
Il y a presque un siècle, au cours des années 1920, Edwin Hubble mettait fin à un grand débat entre astronomes, à savoir si des nébuleuses comme la Galaxie d’Andromède, la Galaxie du Triangle ou d’autres nébuleuses du Groupe local de galaxies, aussi appelé le Groupe local, étaient des objets présents dans la Voie lactée ou au-dehors.
Hubble allait pour cela utiliser les céphéides, ces étoiles variables, comme des indicateurs de distance et, en se basant sur ses travaux (qu’il exposera moins d’une décennie après dans son célèbre ouvrage The Realm Of The Nebulae), il a montré qu’il s’agissait bien d’astres extragalactiques avec des tailles comparables à celle de notre Galaxie. Aujourd’hui, les astronomes savent bien que le Groupe local contient un peu plus de 60 galaxies, dont notre Voie lactée, dans un volume dont le diamètre est d’environ dix millions d’années-lumière.
Ces galaxies sont chacune plongées dans un halo de gaz et d’étoiles diffus, difficilement détectables, et aussi, pense-t-on, dans un halo de matière noire contenant l’essentiel de la masse présente. On estime toutefois qu’environ 70 % de la masse de la matière normale dans chaque ensemble halo+galaxie se trouvent dans le halo.
On ne savait pas très bien qu’elle était la taille du halo de matière normale, baryonique comme disent les physiciens (les protons et neutrons étant des exemples de baryons). Or, un groupe d’astrophysiciens mené par Nikole M. Nielsen, chercheuse à l’Université de Swinburne (Australie), à ASTRO 3D et professeure adjointe à l’université d’Oklahoma, vient de publier un article à ce sujet dans Nature Astronomy.
Un milieu circumgalactique pouvant s’étendre jusqu’à un million d’années-lumière
On peut en trouver une version en accès libre sur arXiv qu’accompagne un communiqué de Astro 3D expliquant que le milieu circumgalactique (CGM pour circumgalactic medium en anglais) constituant le halo d’au moins une galaxie vient de voir sa taille déterminée. Il s’agit de celui de la galaxie IRAS 08339+6517 située à environ à 270 millions d’années-lumière de la Voie lactée. C’est une galaxie à flambée de formation d’étoiles et donc très lumineuse dans l’infrarouge, ce que laisse deviner le fait qu’elle porte un numéro dans le catalogue de sources de la célèbre mission Infrared Astronomical Satellite (Iras) de la Nasa.
Nikole M. Nielsen et ses collègues annoncent donc aujourd’hui que le CGM pourrait s’étendre jusqu’à un million d’années-lumière autour de chaque galaxie. Dans le cas d’IRAS 08339+6517, il aurait environ 200 000 années-lumière de diamètre alors que celui de la galaxie dans sa forme la plus lumineuse est de 15 600 années-lumière. Rappelons que, dans le cas de la Voie lactée, son diamètre est d’environ 100 000 années-lumière, ce qui laisse penser maintenant que le CGM de notre Galaxie et celui d’Andromède sont déjà en contact et que donc, d’une certaine façon, elles sont déjà en collision !
Dans le communiqué, Nikole Nielsen précise au sujet du CGM que « nous voyons maintenant où s’arrête l’influence de la galaxie, la transition où elle devient partie intégrante de ce qui l’entoure et, finalement, où elle rejoint le réseau cosmique plus large et d’autres galaxies. Ce sont toutes des limites généralement floues. Mais, dans ce cas, nous semblons avoir trouvé une limite assez claire dans cette galaxie entre son milieu interstellaire et son milieu circumgalactique. Dans le CGM, le gaz est chauffé par quelque chose d’autre que les conditions typiques à l’intérieur des galaxies, cela inclut probablement le chauffage provenant des émissions diffuses des galaxies collectives de l’Univers et peut-être une partie de la contribution est due aux chocs ».
L’astrophysicienne ajoute que « en étant capable de comprendre à quoi ressemble le CGM autour de galaxies de différents types — celles qui forment des étoiles, celles qui ne forment plus d’étoiles et celles qui sont en transition entre les deux –, nous pouvons observer des différences dans ce gaz, qui pourraient être à l’origine des différences au sein des galaxies elles-mêmes, et les changements dans ce réservoir pourraient en fait être à l’origine des changements dans la galaxie elle-même ».
Par FUTURA
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