Economie & Finances

PAC 2025 : L’Afrique s’unit pour lutter contre les flux financiers illicites et renforcer la justice fiscale

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Johannesburg, Afrique du Sud | 10 octobre 2025 – Alors que les pays africains font face à une dette croissante, à un espace budgétaire limité et à des besoins de développement de plus en plus pressants, les principales voix du continent se sont réunies à Johannesburg pour répondre à un défi majeur sur les flux financiers illicites et l’urgence d’une architecture fiscale plus équitable. La 13e Conférence panafricaine sur les flux financiers illicites et la fiscalité (PAC) s’est tenue du 7 au 10 octobre 2025, marquant une étape déterminante dans les efforts du continent pour reconquérir sa souveraineté financière et mobiliser ses ressources internes.

Organisée par le Tax Justice Network Africa (TJNA), en collaboration avec la Commission de l’Union africaine (CUA), le Forum africain des administrations fiscales (ATAF), les International Development Economics Associates (IDEAS), la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA) et le Economic Justice Network (EJN), la conférence a rassemblé des décideurs politiques, des administrateurs fiscaux, des universitaires et des représentants de la société civile venus de toute l’Afrique et d’ailleurs.

Cette édition de la conférence revêt une importance particulière : elle coïncide avec le dixième anniversaire du rapport historique du Panel de haut niveau sur les flux financiers illicites (PHN), publié en 2015. Présidé par l’ancien président sud-africain Thabo Mbeki, ce rapport avait mis en lumière l’ampleur alarmante de la fuite illicite de capitaux hors d’Afrique et ses conséquences désastreuses sur le développement. Dix ans plus tard, l’enjeu reste tout aussi crucial, voire plus urgent encore.

« Lorsque le Panel de haut niveau a publié son rapport en 2015, nous avons voulu rendre visible ce qui avait été trop longtemps dissimulé : le pillage massif des ressources africaines à travers les flux financiers illicites », a déclaré le président Mbeki lors de l’ouverture de la conférence. « Nous avons démontré que les FFI ne sont pas un problème abstrait, mais une réalité qui affaiblit directement la capacité de l’Afrique à financer son développement, à offrir des services sociaux et à bâtir les infrastructures et les industries nécessaires à la prospérité de ses peuples. »

Les participants ont reconnu les progrès réalisés en matière de renforcement des systèmes fiscaux et de promotion de la transparence financière. Toutefois, les défis persistent, notamment face à des réformes fiscales mondiales menées sans une réelle représentation africaine. Les réformes en cours menées par l’OCDE, y compris la solution en deux piliers, n’ont pas permis une juste répartition des profits au bénéfice des pays d’origine, ce qui a renforcé les appels en faveur d’un cadre fiscal international plus inclusif, piloté par les Nations Unies.

« Dix ans après la publication du rapport du PHN, la question des flux financiers illicites est plus pressante que jamais », a souligné Chenai Mukumba, directrice exécutive du TJNA. « Malgré les avancées en matière de sensibilisation et de plaidoyer, l’ampleur des sorties illicites de capitaux continue de compromettre la capacité de l’Afrique à financer son propre développement. Nous sommes à un tournant où les paroles doivent se traduire par des actions concrètes. Cela exige un leadership politique fort et une redevabilité à tous les niveaux. »

Pour Mary Baine, secrétaire exécutive de l’ATAF, la situation appelle à une vigilance accrue : « La lutte contre les FFI est loin d’être terminée. Les chiffres sont même en hausse. Parallèlement, l’environnement fiscal mondial évolue rapidement, souvent au détriment de l’Afrique. Il est temps que nos pays s’unissent pour défendre une position commune dans les discussions fiscales internationales. »

La Commission de l’Union africaine appelle à un changement décisif. « Un tournant est en cours : un processus inclusif qui rassemble tous les acteurs pour combattre les FFI », a déclaré le Dr Patrick Ndzana Olomo, directeur par intérim du développement économique, de l’intégration et du commerce. « Si nous voulons financer notre propre développement, nous devons mobiliser nos ressources intérieures. L’Afrique possède ces ressources. Ce qu’il nous faut désormais, c’est la volonté politique. »

Tout au long de la conférence, les discussions ont porté sur l’utilisation des technologies pour améliorer les administrations fiscales, les réponses aux normes fiscales mondiales émergentes, ainsi que les stratégies régionales pour freiner les flux financiers illicites et renforcer la mobilisation des ressources domestiques. L’objectif : favoriser la coopération, renforcer la cohérence des politiques publiques et stimuler les efforts collectifs en faveur de la justice fiscale, de l’intégrité financière et de la souveraineté économique.

Plus qu’un espace d’échange, PAC 2025 a été un véritable appel à l’action. Un appel à repenser la place de l’Afrique dans l’architecture financière mondiale, et à veiller à ce que la richesse du continent serve en priorité son peuple, son développement et son avenir commun.

Par Zaynab SANGARÈ

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