L’annonce par Téhéran, le samedi 21 juin, de sa volonté potentielle de fermer le détroit d’Ormuz, dans le contexte d’une escalade militaire impliquant désormais Israël et les États-Unis, constitue un tournant géopolitique aux implications économiques considérables. Ce détroit, passage névralgique entre le golfe Persique et le golfe d’Oman, voit transiter chaque année environ un cinquième de la production mondiale de pétrole et un tiers de celle de gaz naturel liquéfié (GNL). Dès lors, toute entrave à sa libre circulation menace non seulement la stabilité régionale, mais aussi l’équilibre énergétique mondial.
Un carrefour stratégique sous tension
Le détroit d’Ormuz, frontalier de l’Iran, des Émirats arabes unis et du sultanat d’Oman, est bien plus qu’une simple voie maritime. Il représente un verrou géostratégique, un « chokepoint » essentiel dont la fermeture aurait des conséquences immédiates sur les marchés mondiaux. En menaçant d’en interrompre le trafic, Téhéran recourt à un levier diplomatique et militaire redoutable : celui de l’énergie.
Ce bras de mer étroit, où transite une part significative des ressources énergétiques exportées du Moyen-Orient vers l’Asie, l’Europe et l’Amérique du Nord, incarne une vulnérabilité structurelle du commerce mondial. L’Iran, par cette posture, entend faire pression sur les puissances occidentales en mettant en péril l’approvisionnement énergétique de leurs alliés.
Une onde de choc sur les marchés
Sans surprise, les marchés pétroliers ont réagi avec nervosité. Le dimanche 22 juin au soir, les cours du brut américain comme ceux du pétrole de la mer du Nord ont bondi de 4 % dès l’ouverture, avant de refluer légèrement dans la soirée. Cette hausse fait suite à une première flambée des prix, observée la semaine précédente, en réaction aux premières frappes israéliennes contre l’Iran.
L’effet de ces tensions géopolitiques sur les prix de l’énergie rappelle la dépendance persistante de l’économie mondiale à des corridors logistiques vulnérables. Si la fermeture du détroit venait à se concrétiser, le choc pourrait être massif : désorganisation des chaînes d’approvisionnement, flambée généralisée des prix, récession énergétique pour les économies les plus dépendantes du pétrole importé.
L’enjeu dépasse la seule dimension énergétique
Au-delà des seules considérations économiques, c’est la stabilité géopolitique du Moyen-Orient qui est en jeu. L’engagement direct des États-Unis aux côtés d’Israël dans le conflit contre l’Iran pourrait précipiter une guerre régionale ouverte, où les puissances rivales — comme la Chine et la Russie — pourraient être tentées de s’impliquer, directement ou indirectement.
En somme, le détroit d’Ormuz, souvent qualifié de « thermomètre du Moyen-Orient », cristallise aujourd’hui toutes les tensions d’un monde interdépendant, où les intérêts énergétiques, militaires et diplomatiques s’entrelacent de manière inextricable. Sa fermeture éventuelle serait bien plus qu’un simple acte de guerre : elle incarnerait une fracture majeure dans l’ordre géoéconomique mondial.
Par Babou Landing Diallo
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