Météo France vient de participer au premier Sommet mondial pour l’Action sur l’Intelligence artificielle afin de présenter ses innovations et projets. Le service de prévisions météo travaille actuellement sur de nouveaux produits liés à l’IA pour mieux prédire les catastrophes météo et assurer la sécurité du public et des biens. Nous avons parlé avec l’un des experts qui développe justement ces programmes.
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L’Intelligence artificielle est en train de devenir le nouvel espoir de la météorologie, tous les organismes de prévisions se mettent à miser dessus et Météo France a commencé à s’intéresser au deep learning, un sous-domaine de l’IA, il y a six ans déjà. Bruno Pradel est data scientist au laboratoire de l’Intelligence artificielle chez Météo France et travaille au développement de futurs produits.
Selon lui, l’une des principales révolutions de l’IA dans la météo est la rapidité de calcul des prévisions : les modèles traditionnels nécessitent une heure de calcul pour effectuer une prévision, les IA peuvent le faire en une minute après la phase d’apprentissage. Les modèles de prévision météo pourront donc bénéficier de mises à jour en continu, ce quoi n’est pas le cas actuellement.
Les phénomènes météo extrêmes seront mieux anticipés
Mais ce qui intéresse avant tout Météo France, c’est l’amélioration de la prévision des phénomènes météorologiques extrêmes susceptibles de conduire à des catastrophes. C’est l’objectif du programme « Espresso » (Estimating Precipitations with Satellites Observations) qui permet déjà de mieux anticiper les événements rares, et avec un faible coût.
« La couverture du globe avec les radars de précipitations n’est pas complète : il y a une différence entre les pays riches et les pays pauvres. L’idée d’Espresso, c’est d’estimer les événements sur les zones hors d’atteinte classique, comme les océans, les montagnes et les territoires d’outre-mer. Cela permet d’avoir des observations en temps réel grâce aux images satellites qui sortent toutes les 15 minutes, explique Bruno Pradel. Pour les cyclones, c’est un nouvel outil destiné aux météorologues. Il a déjà été utilisé par la cellule de crise et a eu un rôle sur les décisions prises lors des cyclones Chido et Dikeledi à Mayotte. Les retours des prévisionnistes qui l’ont utilisé ont été positifs ».
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L’IA a déjà été testée pour la prévision de cyclones ces derniers mois. © Nasa
La présence d’un météorologue sera toujours indispensable
Météo France développe également un autre produit sur la prévision du brouillard, un phénomène difficile à prévoir et source de nombreux accidents. Les essais se concentrent actuellement sur le brouillard présent sur la Seine, afin d’éviter les accidents de navigation fluviale. Le programme IA qui travaille dessus a bénéficié des observations des capteurs des navires, afin d’apprendre à prévoir le phénomène.
Grâce à cela, l’IA peut désormais prévoir le brouillard une heure avant, avec une amélioration de 20 % des prévisions sur le phénomène. Mais qu’en est-il du rôle du météorologue dans tout ça ? « Le travail du prévisionniste ne va pas changer énormément, car il travaille déjà sur des modèles différents. Même avec l’IA, l’étape finale reste toujours d’évaluer les résultats. Il faut toujours un œil humain qui valide les informations. L’IA peut tout de même fournir des outils d’aide à la décision, en détectant ce qui est le plus à risque dans toutes les informations météo. L’IA pourra fournir des alertes aux prévisionnistes sur un événement précis : il sera averti d’un potentiel phénomène dangereux qui peut arriver, même si la probabilité est faible ».
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Le brouillard est l’un des phénomènes météo qui causent le plus d’accidents et un produit IA travaille actuellement sur sa prévision. © Dae Young Kim
L’équipe travaille également sur un autre produit destiné à mieux évaluer la quantité de neige au sol, et cela, d’une manière étonnante : en analysant toutes les webcams disponibles ! L’idée est ensuite d’utiliser ces données pour générer une carte très précise des zones enneigées et de la quantité de neige présente. Le même travail est à l’étude pour estimer les vents et la hauteur des vagues, toujours grâce aux webcams.
L’IA ne permet pas seulement de mieux prévoir la météo au jour le jour, elle a aussi un intérêt pour les prévisions climatiques à beaucoup plus long terme donc. « L’IA va permettre une descente d’échelle, c’est-à-dire des prévisions plus locales : ce qu’il va se passer dans une région, et pas seulement au niveau d’un pays. Car même si le climat évolue, les lois qui régissent l’atmosphère restent les mêmes » explique le data scientist.
Par FUTURA
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