Quiconque a l’intention d’être immédiatement opérationnel dans une nouvelle organisation doit d’abord cultiver ses alliances ; un réseau de personnes pouvant fournir les informations, les ressources et le soutien nécessaires pour réussir. Mais peu de programmes d’intégration proposent des conseils concrets sur la façon de construire ces liens capitaux. Les recherches que nous avons effectuées au cours de la décennie passée montrent que le fait de répliquer le réseau d’un employé bien installé dans une culture influente prend en général trois à cinq années. Mais, récemment, nous avons commencé à nous demander s’il existait un moyen d’accélérer ce processus.
Pouvions-nous développer un schéma directeur pour le réseautage novice ? Nous avons commencé par suivre des personnes qui rejoignaient des entreprises dont l’effectif variait de quelques centaines à plus de 40 000 employés et avons couplé leurs progrès en matière de connexions sociales à des données concernant l’attrition mensuelle.
L’objectif était d’identifier les nouveaux venus qui avaient réussi à se lier (et à devenir productifs) bien plus rapidement que leurs homologues ayant commencé au même moment et qui se maintenaient au sein de l’organisation au-delà de certaines dates clés, comme les neuf premiers mois ou la tranche de deux à quatre ans, lors desquelles le risque de départ est le plus important.
Nous avons eu quelques surprises. Tout d’abord, contrairement à la croyance populaire, faire du « développement de marque » sur toute l’étendue d’un réseau très large n’était pas nécessairement la meilleure chose à faire ; d’ailleurs, cela est corrélé à des départs entre la deuxième et la quatrième année.
Les nouveaux venus qui réussissaient étaient au contraire plus sélectifs et moins superficiels dans leur démarche. Ils fixaient tout de même beaucoup de rendez-vous exploratoires, mais ils s’en servaient pour poser une multitude de questions, proposer leur expertise et leur aide dans leurs domaines de compétences, créer des gains mutuels et générer de l’énergie. Greg Pryor, responsable des talents chez Workday, qui s’est associé à nous pour ces recherches, décrit cette différence comme le fait d’attirer des gens dans votre réseau plutôt que de s’imposer dans le leur. « Nous apprenons à nos employés à attirer des gens vers leurs idées et à créer de l’énergie dans les interactions dès le premier jour, explique-t-il. Quand vous adoptez cette approche, vous avez bien plus de chances de bien vous entendre. » Nous avons également découvert, de nouveau à l’inverse des croyances populaires, que les nouveaux venus n’ont pas besoin d’un lien fort avec un ancien mentor ou supérieur durant leurs neuf premiers mois. Plus important pour leur réussite à long terme était le contact précoce avec des leaders d’opinion clés – ceux qui sont bien installés dans les réseaux de l’organisation et qui se sont montrés capables de conférer savoir-faire et légitimité – ainsi qu’avec leurs homologues nouveaux venus, avec lesquels ils pouvaient former des groupes par affinités.
Une autre stratégie après deux ans d’expérience
Il est important de noter que les réseauteurs efficaces modifient en sus leur stratégie alors qu’ils approchent de la période des deux à quatre ans. Ils commencent à optimiser leurs interactions avec leurs collègues proches, ce qui a pour effet de faire baisser leurs demandes collaboratives de 18 à 24% par rapport à leurs pairs, tout en s’affranchissant en même temps des frontières pour se rapprocher de nouvelles personnes occupant d’autres postes ou travaillant dans d’autres services et d’individus possédant des valeurs et des passions similaires, même lorsqu’il n’y a pas d’avantage clair à court terme à le faire.
En résultent davantage d’opportunités d’innovation à l’échelle de l’entreprise et le sentiment d’une raison d’être à leur travail, ce qui stimule leur performance et leur engagement. Booz Allen, qui recrute plus de cent personnes hautement qualifiées chaque semaine, est un autre partenaire de recherche qui s’est servi de l’analyse des réseaux pour repenser ses activités d’intégration afin d’aider les recrues récentes à établir les bonnes connexions au bon moment.
En plus de proposer une formation aux techniques de l’attrait (par rapport à celles qui consistent à s’imposer), il encourage la création de réseaux de cohortes et lance de nouvelles rencontres entre nouveaux employés et influenceurs de réseaux plutôt qu’avec les habituels mentors et managers. « Vous ne demandez pas aux gens de se mettre en lien avec beaucoup d’autres personnes, explique David Sylvester, responsable de l’apprentissage et du développement au sein de l’entreprise. Les investissements très ciblés font vraiment la différence parce que les individus deviennent plus productifs plus vite et parce qu’ils apprécient leur passage au sein de l’entreprise. »
Par Harvard Business Review France
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