Au cours des trente derniers mois, j’ai animé plus de 360 conférences, ateliers et séminaires, en présentiel ou à distance, sur la santé émotionnelle, le bien-être et la prévention du burn-out. J’ai eu la chance de travailler avec des personnes issues de toutes sortes de secteurs, y compris avec des médecins aux avant-postes du Covid, des salariés de grandes et de petites entreprises et d’autres au service du secteur à but non lucratif. Ayant gardé le contact avec nombre d’entre elles, j’ai pu déterminer quelles pratiques relatives à la santé émotionnelle ont eu un impact positif sur leur bien-être.
La leçon principale que j’en ai retirée est que pour améliorer son bien-être au travail, ce sont les petits gestes pratiqués de façon régulière qui font toute la différence.
Mais soyons clair : le bien-être des employés n’est pas qu’une question individuelle, cela concerne aussi l’entreprise. De nombreux facteurs l’influencent, parmi lesquels la charge de travail, la souplesse accordée, le management et la culture d’équipe.
Vous ne pouvez sans doute pas changer votre entreprise ou votre manager, mais il existe des actions concrètes, dont l’efficacité est scientifiquement démontrée, que vous pouvez mettre en œuvre au quotidien pour renforcer votre équilibre émotionnel et votre bien-être.
La santé émotionnelle peut être définie comme la capacité à établir une relation bienveillante avec soi-même, ses pensées, ses émotions, ainsi qu’avec autrui. De même que l’amélioration de votre condition physique vous permet de mieux relever des défis corporels, le renforcement de votre santé émotionnelle vous rend plus apte à faire face aux épreuves affectives avec aisance, en minimisant le stress et le sentiment d’être dépassé.
Voici six pratiques simples, mais étonnamment puissantes de mise en forme émotionnelle pour vous aider à mieux gérer votre stress et à améliorer votre bien-être :
1/ Vérifiez chaque jour que tout va bien pour vous
Interrogez-vous chaque jour sur votre état : « Comment je me sens aujourd’hui ? » Abstenez-vous de porter un jugement ou de chercher à corriger immédiatement votre état. L’objectif est simplement de prendre conscience de votre situation émotionnelle.
J’ai évoqué cette pratique durant un discours liminaire et une jeune femme est venue me voir après pour me dire qu’elle m’avait déjà entendu en parler. « À l’époque, je me sentais complètement au bout du rouleau, m’a-t-elle confié. Je doutais que cela change quoi que ce soit, mais j’ai décidé d’essayer. J’ai été surprise de constater à quel point cela m’a fait du bien. Au lieu d’être submergée par le stress ou dépassée, j’ai pris conscience de ces sentiments et je les contrôle bien mieux à présent ».
Les recherches confirment son expérience : les personnes attentives à leurs émotions rapportent généralement un meilleur bien-être. Paradoxalement, la reconnaissance des sentiments difficiles contribue à en atténuer l’impact et permet d’agir pour améliorer son état émotionnel.
2/ Faites quelques pauses, brèves, mais qualitatives, durant la journée
Ici, le mot-clé est « qualité ». Cela implique de faire quelque chose qui déconnecte du travail, qui aide à recharger ses batteries et à refaire le plein d’énergie. Regarder les médias sociaux ou lire les dernières news ne répond pas à ces critères, pas plus que rattraper son retard sur sa « to-do list ».
Le cerveau humain a besoin de faire une pause toutes les 90 à 120 minutes pour fonctionner de façon optimale et éviter de se sentir dépassé et d’accumuler du stress. Microsoft a ainsi récemment mené une étude de grande ampleur sur le sujet et trouvé qu’une pause de cinq à dix minutes entre chaque réunion réduit sensiblement le stress accumulé et améliore la concentration.
Ma façon préférée de me déconnecter de mon travail en journée est de sortir marcher un court moment. Comme le prouvent quantité d’études, cela remonte le moral et améliore la concentration et la motivation. De plus, lorsque cette pratique devient une habitude, la marche offre de nombreux avantages pour la santé à long terme.
3/ Entraînez-vous à accepter de ne vous concentrer que sur ce que vous contrôlez
L’acceptation se fait en deux étapes : tout d’abord, évaluez la situation de façon lucide en vous concentrant sur les faits que vous savez vrais. Ensuite, identifiez une mesure que vous pourriez prendre pour avancer en étant moins stressé et plus détendu.
L’une des femmes qui ont participé à mon programme sur le leadership dans lequel j’apprends l’acceptation aux participants m’a récemment confié que c’est la principale compétence qu’elle mobilise lorsqu’elle doit affronter des défis et des incertitudes au travail. « Chaque fois que mon travail, l’économie ou différentes choses avec mon équipe me stressent, je m’arrête, je respire un grand coup et je me demande ce que je pourrais faire pour aller de l’avant compte tenu de la situation et de ce que je contrôle. Se poser cette question en tant qu’équipe a aussi permis d’améliorer la concentration de cette dernière et son niveau de stress », m’a-t-elle confié.
Efforcez-vous d’accueillir vos collaborateurs avec un enthousiasme sincère, que ce soit au téléphone ou lors de votre première rencontre de la journée. En visioconférence, où l’on a tendance à aborder directement l’ordre du jour, prenez le temps d’inviter chaque participant à partager un moment positif de sa semaine. Veillez également à prendre des nouvelles de vos collègues de manière intentionnelle, en dépassant le cadre strictement professionnel.
Après les années d’isolement et de détresse psychologique liées à la pandémie, nous aspirons tous à renouer des liens humains. Ce besoin fondamental est corroboré par les études, qui démontrent que le sentiment de soutien social et de connexion améliore la santé mentale tout en réduisant le stress et l’anxiété.
Ainsi, prenez l’initiative de créer quotidiennement un moment d’échange avec un collègue. Cet effort minime aura un impact positif sur votre bien-être tout en aidant votre interlocuteur à combattre le sentiment de solitude.
Si vous n’en avez pas, créez-vous une pratique journalière de gratitude, qui peut être aussi simple que de noter chaque matin ou chaque soir trois choses que vous appréciez.
Développer un état d’esprit de gratitude est toujours bénéfique pour le bien-être, mais encore plus en période d’incertitude. Cette dernière étant extrêmement stressante et énergivore pour le cerveau – c’est ce qu’il a le plus de mal à gérer –, il va alors se concentrer sur le danger potentiel et se mettre en mode « fuite ou combat » pour vous protéger. Cela peut exacerber l’anxiété et la rumination autour de résultats négatifs et de scénarios du pire.
En pratiquant la gratitude, vous demandez à votre cerveau d’élargir sa focale et de tourner son attention vers des choses positives, chargées de sens ou réconfortantes. L’objectif n’est pas de nier les difficultés auxquelles vous êtes confronté, mais de vous rappeler que votre vie ne se résume pas à cela. Ce faisant, vous alimenterez votre énergie émotionnelle et renforcerez votre résilience qui est votre capacité à vous adapter de façon positive à des défis.
6/ Pratiquez le repos actif en dehors de votre travail
Enfin, il faut absolument consacrer du temps en dehors de son travail à des choses que l’on aime, que ce soit son hobby préféré, la lecture ou le jardinage. Essayez une nouvelle activité, comme l’aquarelle ou l’écriture. La clé est de faire quelque chose qui vous donne de l’énergie et vous nourrit d’une manière autre que professionnelle. (En revanche, se gaver de séries Netflix pendant des heures n’est pas du repos actif, même si regarder de temps à autre un épisode de votre programme préféré reste une bonne option).
Après mon propre burnout, je me suis mise à la peinture ; avoir quelque chose qui me permet d’oublier complètement mon travail tout en nourrissant mon moi créatif a considérablement contribué à améliorer mon bien-être. Une étude récente sur le surmenage professionnel des infirmiers confirme ce que j’ai moi-même expérimenté : celles ou ceux qui se reposaient de façon active en dehors de leur travail en consacrant une partie de leur temps libre à un hobby, à des amis ou à leur famille étaient moins susceptibles de faire un burnout que ceux et celles qui ne faisaient pas l’effort de se déconnecter de leur travail après la fin de leur service.
Comme on dit, « vous n’êtes pas votre travail ». Même si votre activité professionnelle vous passionne – et peut-être d’autant plus dans ce cas – il est primordial de consacrer une partie de votre temps libre à d’autres occupations qui vous procurent du plaisir. Si votre esprit, conditionné par la productivité, se rebiffe, gardez à l’esprit que le repos actif est un investissement dans votre capacité à rester pleinement engagé dans votre travail sur le long terme.
Par Harvard Business Review France
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