Nous aspirons tous à maintenir notre concentration et à rester efficaces, même lorsque notre esprit est préoccupé. Voici quelques astuces pour atténuer l’impact des préoccupations et des distractions.
Notre capacité à nous concentrer est, on le sait, un vecteur de succès. Qu’il s’agisse de se concentrer sur soi-même, et d’être en phase avec ses intuitions et ses valeurs, ou de se focaliser sur l’extérieur pour évoluer dans le monde qui nous entoure, il est précieux de savoir redoubler d’attention.
Bien trop souvent, notre concentration et notre attention subissent des détournements. Nous sommes alors pris d’une fatigue extrême, nous devenons étourdis et nous sommes incapables de nous concentrer.
Quand je travaille avec des cadres, voici les phrases que j’entends le plus souvent quand ils n’arrivent plus à se concentrer (j’ai pu en prononcer quelques-unes moi-même) :
- « J’ai l’impression d’être complètement submergé. »
- « La charge de travail que j’ai est démente, et je n’ai jamais assez de temps pour aller jusqu’au bout des choses quand je suis en réunion et quand j’ai des problèmes urgents à régler toute la journée. »
- « La pression et les distractions constantes sur mon lieu de travail m’épuisent mentalement. Je crois que je suis tout simplement incapable de me concentrer. »
Il ne fait pas de doute que les distractions récurrentes et le manque de temps perturbent notre concentration, mais le stress joue également un rôle majeur là-dedans.
Ce stress qui court-circuitent nos fonctions cognitives
Le stress chronique inonde notre système nerveux de cortisol et d’adrénaline qui court-circuitent les fonctions cognitives importantes. Depuis des décennies, la recherche s’intéresse aux effets négatifs du stress sur la concentration, sur la mémoire et sur d’autres fonctions cognitives. Les conclusions sont les mêmes. Le stress ponctuel fait grimper le taux de cortisol (la fameuse « hormone du stress ») durant de courtes périodes, augmente notre adrénaline et nous incite à travailler plus efficacement face à une date butoir imminente. Le stress prolongé peut, quant à lui, provoquer une augmentation durable du taux de cortisol et s’avérer toxique pour le cerveau. Les chercheurs soupçonnent également le cortisol de contribuer largement à l’apparition de la maladie d’Alzheimer et d’autres formes de démence, lorsqu’il est présent à un taux élevé, pendant trop longtemps.
Quand nous n’arrivons pas à nous concentrer au travail à cause de distractions diverses, cela peut occasionner un stress important car nous avons le sentiment de ne pas être assez productifs. Ce stress entraîne à son tour une baisse de la concentration. Un cercle vicieux s’installe. Malheureusement, bien souvent, nous ne remarquons cette baisse de concentration que lorsque nous sommes complètement submergés. Or, quand l’épuisement mental et émotionnel s’installe, il assèche encore davantage notre capacité à nous concentrer et à nous souvenir d’informations.
Conscience de soi et self-management
Heureusement, nous ne sommes pas complètement démunis face à ce cercle vicieux. Dans le cadre de mes recherches, j’ai découvert que l’une des raisons pour lesquelles certaines personnes font des burnout, et d’autres non, est que ces dernières se servent de leur intelligence émotionnelle (IE) pour gérer leur stress. Vous pouvez mobiliser les mêmes compétences, en particulier la conscience de soi et le self-management, pour aiguiser votre concentration. Voici comment vous y prendre.
Commencez par mobiliser votre conscience de vous-même pour identifier plusieurs facteurs :
1- Les raisons pour lesquelles vous êtes stressé ou anxieux. Avant de vous occuper de votre stress, vous devez en connaître la cause. Aussi simple que cela puisse paraître, il peut être utile de dresser une liste des sources du stress qui vous accablent. Notez chacune des choses de votre vie, personnelle et professionnelle, qui vous rendent anxieux. Répartissez-les en deux catégories : les choses que vous avez le pouvoir de changer et celles pour lesquelles vous ne pouvez rien faire. Pour les facteurs de stress appartenant à la seconde catégorie, vous devrez trouver un moyen de changer d’attitude à leur égard.
2- La façon dont vous perdez votre capacité à vous concentrer. D’après le psychologue clinicien Michael Lipson, il est possible d’apprendre à développer sa concentration en comprenant comment celle-ci se met à divaguer. En faisant attention aux schémas qui mènent à la dissipation, vous serez progressivement capable d’écarter les distractions et de tenir à votre point de focalisation premier.
3- L’état d’esprit dans lequel vous êtes quand vous n’arrivez pas à vous concentrer. Est-ce que vous êtes angoissé quand vous n’arrivez pas à vous souvenir de telle ou telle information, alors même que vous en avez besoin à ce moment-là (par exemple, lors d’un entretien, d’une présentation aux enjeux élevés ou d’une réunion importante avec un client) ? Avez-vous l’impression d’être tendu et étourdi en vous creusant les méninges pour trouver les bons mots lorsque vous rédigez un e-mail important ? Voilà des signaux montrant que vous êtes peut-être plus stressé que vous ne le croyez et que votre incapacité à vous concentrer est en train de générer encore davantage de stress.
4- Le moment où vous perdez votre capacité de concentration. Si, par exemple, vous vous surprenez à être en train de vous faire un sang d’encre à propos d’une chose ou d’une autre, alors que vous roulez à 110 km/h sur l’autoroute dans une voiture remplie d’enfants, vous vous mettez, vous et les autres, en situation de réel danger. Ce peut être l’occasion de prendre conscience qu’il faut recentrer votre attention sur ce que vous êtes en train de faire et de décider de réfléchir à vos problèmes ultérieurement.
Une fois que vous avez bien pris conscience des origines de votre stress, et de quelle manière et à quel moment précis vous perdez votre concentration, vous pouvez employer les stratégies suivantes. Elles font appel à votre self-management et vous permettront de prendre de meilleures décisions avec pour objectif de ne pas vous relâcher.
– Faites une désintoxication numérique. En 2017, dans son enquête sur le stress aux Etats-Unis, l’American psychological association (APA) concluait que les « vérificateurs incessants » (les personnes qui vérifient leurs e-mails, leurs textos et leurs réseaux sociaux constamment) sont davantage stressés que les autres. Plus de 42% des sondés attribuent leur stress à des discussions d’ordre politique et culturel, qu’ils ont eues sur les réseaux sociaux ; or, ce n’est le cas que pour 33% des personnes ne vérifiant pas de façon compulsive leurs écrans. Selon l’APA, même s’il paraît impossible d’arrêter tout net sa consommation technologique, le fait de couper ou de limiter périodiquement votre accès numérique peut être grandement bénéfique pour votre santé mentale.
– Reposez votre cerveau. Nous avons pour la plupart déjà fait des insomnies parce que nous ruminions des événements passés ou des craintes et des angoisses liées à l’avenir. Mais lorsque vous en faites plusieurs de suite, le manque de sommeil peut se faire sentir : il devient plus difficile de se concentrer et plus éprouvant de recevoir des informations ou de s’en souvenir. Notre interprétation des événements et notre jugement peuvent s’en trouver également altérés. Le manque de sommeil peut affecter négativement nos décisions car cela dégrade notre capacité à évaluer correctement une situation, à s’adapter en conséquence et à adopter le bon comportement. Quand vous êtes stressé, il peut sembler impossible de dormir 7 à 8 heures comme cela est recommandé, mais les bénéfices en valent le coup.
– Pratiquez la pleine conscience. Les études sur la pleine conscience sont claires. La pratique de la pleine conscience inhibe notre tendance à tirer des conclusions hâtives et à avoir des réactions automatiques que nous regrettons parfois par la suite (et qui sont potentiellement sources de plus de stress encore). « La pleine conscience stimule le système fronto-pariétal du cerveau, qui contribue à renforcer l’attention », selon le neuroscientifique Richard Davidson. Autrement dit, la pleine conscience est la clé de la résilience émotionnelle, elle-même essentielle à notre capacité à nous remettre rapidement d’un épisode stressant. Pas d’inquiétude, vous n’avez pas besoin d’être un yogi expérimenté pour pratiquer la pleine conscience. Des méthodes simples à destination du commun des mortels sont disponibles un peu partout.
– Concentrez-vous plutôt sur les autres. Quand nous faisons une fixation sur nos propres craintes et préoccupations, cela peut éloigner notre attention des personnes qui comptent pour nous. Des études montrent que le fait de changer de focale, et de se concentrer sur les autres, produit des effets physiologiques qui nous apaisent et renforcent notre résilience. Si vous faites plus attention aux sentiments des autres, et à leurs besoins, et que vous leur montrez que vous vous souciez d’eux, vous allez non seulement pouvoir oublier que vous êtes stressé mais aussi récolter les bénéfices liés au fait de savoir que vous êtes en train de faire quelque chose d’important pour une personne qui compte.
Trop nombreuses sont les personnes qui ont l’impression qu’elles doivent travailler encore plus dur quand elles ont du mal à se concentrer. Cette stratégie pourrait bien s’avérer contre-productive. A la place, faites attention aux causes de votre stress et de votre incapacité à vous concentrer, puis prenez des mesures qui vous permettront de stimuler les fonctions cérébrales responsables de la concentration et de la présence d’esprit.
Par Harvard Business Review France
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