Une limite planétaire, c’est une sorte de frontière définie par les scientifiques. Une frontière qu’il faut éviter de dépasser si nous voulons continuer à vivre dans un environnement plus ou moins sûr. Ces limites planétaires sont aujourd’hui au nombre de neuf.
Le concept de limite planétaire a été introduit en 2009 — puis mis à jour en 2015 — par une équipe internationale de scientifiques menée par des chercheurs de l’université de Stockholm (Suède). Leur objectif était alors d’évaluer scientifiquement le risque que les perturbations causées par l’humanité déstabilisent le système Terre à l’échelle planétaire. Ils ont ainsi défini les limites environnementales dans lesquelles nous pouvons évoluer en toute sécurité. Se rapprochant du concept de développement durable. Elles sont aujourd’hui au nombre de neuf.
L’appauvrissement de l’ozone stratosphérique, une limite planétaire en zone sûre
Les scientifiques ont observé que la couche d’ozone stratosphérique s’appauvrit depuis les années 1970. Un appauvrissement généralisé doublé d’une perte plus marquée du côté des pôles. Un trou dans la couche d’ozone découvert, lui, au milieu des années 1980. Tous les deux résultant de l’usage massif, pendant des années, de chlorofluorocarbures (CFC) dans les systèmes de réfrigération ou dans les aérosols, par exemple.
Le protocole de Montréal, signé en 1987, visait à interdire progressivement l’usage de ces substances appauvrissant la couche d’ozone. Et le résultat est là : selon un rapport publié par l’Organisation des Nations unies (ONU) en janvier 2023, notre couche d’ozone pourrait être entièrement restaurée d’ici 40 ans.
L’appauvrissement de la couche d’ozone stratosphérique demeure dans la liste des limites planétaires notamment parce que, sans la protection qu’elle offre contre les rayonnements ultraviolets (UV) venus du Soleil, les dommages aux systèmes biologiques aussi bien terrestres que marins pourraient être importants.
La perte d’intégrité de la biosphère
Une évaluation publiée en 2005 note que les modifications des écosystèmes dues aux activités humaines ont été plus rapides au cours des 50 dernières années qu’à n’importe quel moment de l’histoire humaine. De quoi augmenter les risques de changements brusques et irréversibles.
À l’origine de ces modifications, notamment, la demande en nourriture, en eau et en ressources naturelles, qui entraîne une grave perte de biodiversité et des changements dans les services écosystémiques. Résultat : une limite planétaire dépassée.
Les taux élevés actuels de dommages et d’extinction des écosystèmes peuvent être ralentis par des efforts visant à protéger l’intégrité des systèmes vivants, à améliorer l’habitat et à améliorer la connectivité entre les écosystèmes tout en maintenant la productivité agricole élevée dont l’humanité a besoin.
La pollution chimique et la libération de nouvelles entités comme autre limite planétaire
Les émissions de substances toxiques et à longue durée de vie telles que les polluants organiques synthétiques, les composés de métaux lourds et les matières radioactives sont à l’origine de certains des principaux changements d’origine humaine dans l’environnement planétaire.
Ces composés peuvent avoir des effets potentiellement irréversibles sur les organismes vivants et sur l’environnement physique, puisqu’ils peuvent affecter les processus atmosphériques et le climat, par exemple. Des effets qui peuvent se faire ressentir même à de grandes distances des sources de pollution.
La difficulté ici, c’est que ces polluants peuvent aussi interagir les uns avec les autres. Ce qui rend la définition de cette limite planétaire encore plus délicate à fixer. Toutefois, le risque, lui, est suffisamment clair pour que la pollution chimique constitue une priorité pour la mise en œuvre d’actions de prévention.
Un changement climatique hors limites planétaires
Le changement climatique en cours est le résultat de nos émissions dans l’atmosphère d’une quantité trop importante de gaz à effet de serre. Et en la matière, la limite planétaire a été franchie. Elle avait été fixée en fonction d’une certaine concentration en dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère : 350 parties par million (ppm). Il dépasse aujourd’hui les… 415 ppm !
Notre Planète semble par ailleurs se rapprocher de plus en plus de quelques-uns de ceux que les chercheurs appellent les points de basculement. Parfois aussi les points de non-retour. Des seuils au-delà desquels des changements majeurs et irréversibles pourraient se produire. La perte de la glace polaire, par exemple. Ou encore la déforestation.
L’acidification des océans flirte avec sa limite
L’océan absorbe environ un quart du CO2 que nous émettons dans l’atmosphère. Dans l’eau, il forme de l’acide carbonique qui fait baisser le pH de surface. C’est ce que les scientifiques appellent l’acidification des océans. Nos émissions de gaz à effet de serre ont ainsi aussi pour effet de rendre nos mers plus acides. Par rapport à l’ère préindustrielle, leur acidité a déjà augmenté de 30 % environ. Or au-delà d’un certain seuil, cette acidité rend la vie difficile aux coraux et à certaines espèces de coquillages et de plancton. Avec des répercussions sur la dynamique des écosystèmes marins.
Pour l’heure, cette limite planétaire n’a pas encore été franchie. Mais au rythme où nous allons, elle pourrait bien l’être d’ici 2050.
Des cycles biochimiques perturbés
Les plantes utilisent de l’azote et du phosphore pour se développer. On pourrait ainsi penser qu’il n’y en aurait jamais assez. Pourtant, au-delà d’une certaine limite, ces éléments deviennent nocifs. Ils polluent l’eau et conduisent à ce que les scientifiques appellent l’eutrophisation des milieux. Lorsque des algues se mettent à proliférer en surface, nourrissant de manière excessive des bactéries en profondeur. Des bactéries qui peu à peu consomment tout l’oxygène. Une situation encore empirée par la hausse des températures due au réchauffement climatique. Quand il fait chaud, en effet, l’oxygène perd en solubilité.
L’usage d’engrais par l’agriculture et les déjections de l’élevage intensif sont tenus pour principaux responsables du franchissement de cette limite planétaire.
Une consommation d’eau qui dépasse les limites
L’eau douce ne compte que pour quelques pour cent de l’eau présente sur notre Planète. Elle n’est pas également répartie. Et depuis quelques décennies, les prélèvements pour des usages agricoles ou industriels ont explosé. La limite planétaire d’eau douce que nous pouvons utiliser par an est estimée à 400 km3. Nous en sommes aujourd’hui à plus de… 2 500 km3 !
Modifier à ce point le cycle de l’eau pourrait changer la face de notre Planète. Des chercheurs évoquent par exemple la possibilité de voir la forêt amazonienne se transformer en savane.
Les aérosols, une forme particulière de pollution
Avec les activités humaines, la quantité d’aérosols présents dans notre atmosphère augmente. Des aérosols nocifs pour notre santé et pour l’environnement. Certains, par exemple, peuvent contribuer au changement climatique. Le noir de carbone, par exemple, qui opacifie les surfaces et augmente la quantité de rayonnement solaire absorbée par notre Terre.
Cette limite planétaire là aussi est également compliquée à définir tant les aérosols sont divers, par leurs sources et par leurs impacts. Mais pour l’heure, les scientifiques s’accordent à dire qu’elle n’a pas été franchie.
La limite planétaire au changement d’affectation des sols est franchie
Changer l’affectation des sols, c’est transformer un milieu naturel ou semi-naturel en infrastructure, en zone urbaine ou même en terres agricoles. Les conséquences sont lourdes. Parmi lesquelles, la déforestation, la diminution des capacités de stockage naturel du CO2 ou la perte de biodiversité. Mais aussi, très directement pour nos sociétés, l’augmentation du risque d’inondation, par exemple.
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