Sais-tu quel animal, serpent venimeux le plus long du monde, est capable de paralyser un éléphant ? Aujourd’hui, on va parler du cobra royal, dans Bêtes de Science.
Parmi les animaux extraordinaires étudiés ici, il en est un plus redouté que les autres. Le cobra royal, le plus long serpent venimeux au monde, connu pour sa coiffe et ses morsures mortelles, joue à cache-cache avec l’équipe de chercheurs qui nous accompagne. Et il semblerait qu’aujourd’hui, nous soyons sur le point de gagner la partie.
Le cobra royal, plus long serpent venimeux du monde
Dans la clairière où nous nous trouvons, niché au creux d’un terrier abandonné, un cobra royal s’apprête à sortir de sa tanière. Il a senti un jeune python, qui s’approche dangereusement de son repaire. Du terrier sombre émerge une petite tête aux yeux perçants. Le cobra glisse sur le sol, fluide. Il déroule son corps lisse en agitant devant lui une langue fourchue [psss, psss]. Il cherche sa proie. Ce spécimen a quelques années à peine et mesure déjà 3 mètres de long. Il atteindra bientôt les 5 mètres.
Durant les 20 années de sa vie, le cobra ne cesse jamais de grandir, et il doit donc changer régulièrement de peau. Eh oui, aussi incroyable que cela puisse paraître, le cobra est parfois un peu à l’étroit dans son costume royal. Lorsque c’est le cas, il se débarrasse de sa peau, devenue trop petite, pour en laisser apparaître une autre, toute neuve, et à sa taille cette fois-ci ! C’est ce que l’on appelle « la mue ». Le cobra grandit si vite, qu’il peut faire jusqu’à 5 mues par an ! Mais revenons-en au duel qui se joue sous nos yeux.
Notre compagnon du jour est sorti de son antre. Il arbore des écailles brillantes, noires, olive et grises. Sur son dos et sur son ventre, de fines lignes dessinent des rayures jaune vif. Soudain, c’est le face-à-face ! Python et cobra se toisent. Ni une ni deux, le cobra se dresse, adoptant sa posture de défense. Sa tête ondule à près d’un mètre du sol !
D’un mouvement rapide, le python recule. Mais le cobra dilate son cou et déploie sa célèbre coiffe : deux ailes écailleuses jaillissent de chaque côté de sa tête. En fait, ce sont ses côtes que le cobra gonfle pour élargir sa silhouette et paraître plus imposant aux yeux de ses adversaires. Pour couronner le tout, il siffle et souffle. Le message est clair : l’assaillant n’a qu’à bien se tenir. Et ça, le jeune python l’a compris.
Il amorce un demi-tour, tente de prendre la fuite, mais toujours dressé de tout son corps musculeux, le cobra royal le poursuit. Dix kilos de force pure foncent à présent vers le jeune serpent. Le cobra ne lâche pas sa proie : il peut la poursuivre sur de longues distances. En miroir, son corps agile suit chacun des mouvements du python. Puis vient l’attaque. Le cobra fond sur sa proie à une vitesse ahurissante, ouvre grand ses mâchoires et mord sa victime au cou. En quelques secondes, un liquide mortel jaillit de ses crocs, creux comme des pailles.
En une seule morsure, le cobra royal injecte suffisamment de venin pour terrasser un éléphant adulte… ou 30 humains ! Alors rapidement, le petit serpent, paralysé par le venin qui attaque son corps, capitule. Le cobra n’a plus qu’à ouvrir grand sa gueule pour l’avaler tout cru. Le roi des serpents a encore une fois frappé et le jeune python s’est transformé en goûter. La scène, impressionnante, n’est qu’un petit aperçu des capacités extraordinaires de cet animal craint et vénéré depuis des millénaires. Et tu vas voir que l’ophiologie, la science qui étudie les serpents, a quelques-uns de ses secrets à nous livrer.
Un mangeur de serpents redoutable et… cannibale
Le cobra royal, de son nom scientifique Ophiophagus hannah, vit en Asie du Sud-Est. On le retrouve en Chine, en Inde, en Indonésie, au Laos ou encore aux Philippines. Son habitat de prédilection, c’est la forêt tropicale, mais il s’adapte aussi aux mangroves, aux garrigues ou encore aux champs agricoles, façonnés par les humains. Le cobra est ovipare, ce qui signifie qu’il pond des œufs pour se reproduire, contrairement aux animaux vivipares, dont les petits se développent dans le ventre de leur mère. D’ailleurs, la femelle cobra crée un nid pour ses petits, à partir de feuillages qu’elle rassemble en un cercle.
Tout le temps de la reproduction, le couple de cobras veille ensemble sur leurs petits. Il faut dire qu’il y en a un paquet à surveiller ! Une maman cobra peut pondre près d’une quarantaine d’œufs par portée. Les petits, fraîchement sortis de leurs œufs, ont beau être mignons à croquer, ils sont loin d’être inoffensifs ! Dès leur naissance, ils doivent se débrouiller tout seuls, et pour cela ils peuvent déjà compter sur quelques armes redoutables.
Car le secret du règne sans partage du cobra sur le royaume des reptiles rampants, c’est son corps – une véritable artillerie, façonnée pour la survie ! Par exemple, te souviens-tu de sa langue fourchue, en forme de Y ? Lorsqu’il cherche une proie, le cobra l’agite pour détecter la position de sa victime. Les deux pointes de sa langue fonctionnent en quelque sorte comme des antennes.
Lorsque ces antennes perçoivent une odeur, elles envoient un message à une petite poche située à l’arrière du palais du serpent : l’organe de Jacobson — nous en avions parlé dans l’épisode sur le chat, souviens-toi. L’organe de Jacobson interprète alors l’information plus ou moins comme ça : hummm, ça sent le python à droite ! Le cobra goûte donc l’air avec sa langue ! Et ses pouvoirs ne s’arrêtent pas là !
Car les prouesses du cobra royal le font siéger au sommet de la chaîne alimentaire. La souplesse de ses mâchoires lui permet d’avaler des proies plus grandes que sa propre tête. Son système digestif digère des animaux entiers, alors que le cobra n’a même pas de dents pour les mâcher ! Carnivore, le cobra mange surtout d’autres serpents, d’où son nom scientifique Ophiophagus, qui signifie, tu l’auras deviné, « mangeur de serpent ». Mais il peut aussi croquer de petits animaux, comme des rongeurs ou des oiseaux. Parfois, son dîner n’est autre… qu’un cobra, comme lui ! Eh oui, Sa Majesté est un brin cannibale !
La danse du cobra… n’est pas une danse !
Les exploits physiques du cobra ne le mettent cependant pas à l’abri des nombreux périls qui pèsent sur lui. La mangouste, un petit mammifère carnivore immunisé contre son venin, en fait régulièrement son repas. Mais s’il est en danger, c’est surtout parce que la chasse et la destruction de son habitat par les humains font du cobra royal, une espèce aujourd’hui vulnérable. Dans la région de l’Inde où nous nous trouvons, les habitants vénèrent le cobra et lui prêtent toutes sortes de pouvoirs magiques.
Certains entretiennent un lien quasi familial avec cet animal qui fait partie de leur quotidien, et qu’ils utilisent pour faire des spectacles. Tu as peut-être déjà vu les fameux charmeurs de serpents qui semblent envoûter les cobras grâce à leur flûte ! Cette tradition disparaît peu à peu car le cobra, loin d’être envoûté par la musique, vit en fait cette mise en scène comme une attaque. S’il se dresse, ce n’est pas pour danser : en réalité, il se met en position défensive et suit les mouvements de l’instrument au cas où il devrait attaquer.
Mais même s’il n’est pas fin mélomane, le cobra n’en est pas pour autant sourd comme un pot ! C’est pourtant ce que l’on a longtemps cru, puisque contrairement à nous humains, le cobra n’a pas d’oreilles externes. Et pourtant, il entend ! Les vibrations traversent son corps, puis sa mâchoire jusqu’à son oreille interne ! On ne la voit pas, mais elle existe bel et bien !
Les mécanismes qui permettent aux serpents d’entendre le monde sont encore à l’étude, mais nombre d’entre eux parviennent à entendre les vibrations transmises par le sol et par l’air ! Ils sont donc capables de nous entendre crier quand on les croise, un brin effrayés ! Et ils peuvent aussi nous voir ! Le cobra, contrairement aux autres serpents, a une plutôt bonne vue ! Il peut même repérer une proie en mouvement à 100 mètres de distance ! Incroyable n’est-ce pas ?
Le venin du cobra, une arme biologique létale
Mais je sais que tu trépignes d’impatience, il est donc l’heure de nous pencher sur son arme fatale : son venin. Le venin du cobra est produit en grande quantité par des glandes nichées à l’arrière de ses crocs. Ces glandes sont activées par des muscles. Lorsque le cobra mord une proie, ses muscles compriment les glandes à venin et propulsent le liquide jusqu’aux crocs de l’animal.
Le liquide fatal, véritable arme biologique, est constitué de ce que l’on appelle des neurotoxines. Ce sont elles qui vont venir grignoter les nerfs, le cerveau, en bref, tout ce qui permet à la pauvre victime de vivre ! La propagation du venin provoque des vertiges et des douleurs, jusqu’à l’asphyxie de la proie, qui, complètement paralysée, cesse de respirer.
Alors, on est d’accord, même si c’est cela fait partie du cycle de la nature, c’est assez terrifiant. Mais si cela peut te rassurer, les cas d’humains mordus par des cobras dans la nature sont très rares ! En temps normal, lorsqu’il croise un humain, notre cher compagnon préfère se cacher ou s’enfuir face au danger. Eh oui, le plus effrayé n’est pas forcément celui qu’on croit ! D’ailleurs, le venin du cobra a été étudié en laboratoire, et il a permis de créer des médicaments qui apaisent la douleur, pour… soigner les humains ! Le travail des scientifiques a donc permis de transformer un terrible poison en remède très efficace ! Merci, cher cobra !
Par FUTURA
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