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Agriculture-Subvention de l’État-Digitalisation-Semences…/ Aliou Dia, Président des Forces paysannes dit tout, sans détours

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Le gouvernement sénégalais a décidé d’accorder 120 milliards de FCFA en guise de subvention des intrants au cours de la campagne agricole 2024-2025. Aliou Dia, Président des Forces Paysannes, par ailleurs président du comité national de suivi de la campagne agricole apprécie à sa juste valeur cette action. Il dit être pour la digitalisation de la distribution des semences.

Propos recueillis par Massaër DIA, Sénégal

Le Gouvernement veut consacrer 120 milliards pour la subvention des intrants au cours de la campagne agricole 2024-2025. Comment appréciez-vous cela ?

Je me réjouis d’abord que le conseil interministériel sur l’agriculture soit d’abord organisé. Ça nous a permis effectivement, de faire l’évaluation de la campagne agricole, mais également, de prendre les dispositions nous permettant de faire une bonne production agricole cette année. Le gouvernement a pris beaucoup de décisions dont celle concernant l’octroi d’une enveloppe de 120 milliards. Comme vous le savez l’année dernière, c’était 100 milliards qui avaient été consacrés à la campagne agricole. Si cette année, il y a une augmentation de 20 milliards, on ne peut que s’en féliciter et également féliciter et encourager également l’Etat. Si l’économie sénégalaise est une locomotive, je crois que le plus important se retrouve dans l’agriculture. Donc, c’est une augmentation importante. Cependant, nous avons toujours rappelé le gouvernement que la recommandation de Maputo qui demande à chaque État de mettre 10% de son budget national dans le secteur de l’agriculture, est toujours de mise. Toutefois, c’est important que cette année, qu’on se retrouve avec 20 milliards de FCFA supplémentaire que l’année dernière.

L’État veut impliquer l’armée dans la distribution des semences. Est-ce à dire qu’une partie des semences n’allait pas directement aux ayants-droits ?

Ce n’est pas une question de vouloir dire que l’arachide était détournée, bien que ça n’allait pas aux ayants-droits. Mais l’armée a toujours été impliquée dans la distribution des semences. Il y a une cellule logistique au niveau du ministère de l’agriculture, qui est toujours dirigée par un colonel de l’armée. Dès que débute la campagne agricole, et qu’on arrête la campagne de commercialisation, la gendarmerie at toujours été impliquée pour la traçabilité d’abord de l’arachide, des semences, mais aussi pour le contrôle des camions en vue de connaitre la provenance de ces semences. Le problème, c’est que l’armée n’est que présente dans la composition des commissions de réception et de cession, et règle au besoin, certaines situations de sécurité. Les présidences de commission étaient présidées par les organisations paysannes. Ce qui donnait une autonomie aux paysans. Cette commission était un cadre de concertation, d’échanges des paysans. Mais à un moment donné, l’administration territoriale avait voulu présider ces commissions. C’est ce qui avait donné lieu de voir au niveau des commissions, des présidents qui étaient nommés par des sous-préfets ou par des préfets (…) Le maire est représenté par quelqu’un, la gendarmerie envoyait souvent un gendarme, il y avait les jeunes, il y avait les femmes à travers les Gie et les groupements féminins. Il y avait également les sages…Si cette année, on veut impliquer l’armée autrement, je crois que ça ne peut être que mettre l’armée à la tête des présidents des commissions. Et de ce fait, ce n’est plus les organisations paysannes comme il y en avait d’antan, ce n’est plus également un représentant du préfet ou du sous-préfet qui préside, mais c’est un élément de l’armée qui préside (…) Bien que les paysans doivent être autonomes et indépendants, je crois qu’il est bien d’impliquer l’armée pour régler des problèmes qui pourraient survenir.

Quelle est la position des Forces paysannes par rapport à cette nouvelle donne ?

Nous sommes tout à fait en phase avec l’État. D’abord, le fait de payer les opérateurs nous permettra de mettre ces acteurs dans de bonnes dispositions leur permettant de pouvoir trouver les semences à temps, de régler leurs problèmes avec les banques et de pouvoir mettre à la disposition de l’État au niveau des points de collecte, les semences et les intrants. Il faudrait qu’il y ait la transparence. Parce qu’on constate qu’il y a malheureusement de faux débats.

Le Premier Ministre a demandé au ministère de l’agriculture de prendre les mesures nécessaires pour solder la dette de l’État vis-à-vis des opérateurs. Comment appréciez-vous cette situation ?

C’est une bonne décision, parce que les opérateurs couraient derrière des dettes qui datent de 2021, 2022 et 2023. Si aujourd’hui, le nouveau régime a pris la décision de payer d’abord les dettes de 2021 et 2022 et demande faire un audit sur les dettes de 2023, il faut s’en féliciter. S’agissant maintenant de la régularité de la distribution des semences, de la qualité et de la quantité, il va falloir prendre des décisions pour que les commissions soient opérationnelles. Je crois que le Premier ministre avait demandé que les commissions de réception et de cession soient montées avant le 13 mai. Je crois que ça va être très difficile parce qu’on ne connait pas les opérateurs qui doivent fournir les semences. Les notifications ne sont pas encore faites, les plannings ne sont pas encore terminés.

Le Gouvernement a annoncé la digitalisation de la distribution des semences. Selon vous cette innovation présente-elle des avantages ?

Oui, c’est une bonne chose ! Parce qu’on doit savoir qui est qui, qui fait quoi et où le faire. Cependant, compte tenu du temps qui reste, je ne pense pas que cela soit effectif cette année. Nous sommes dans la première décade du mois de mai et dans la deuxième décade, le sud du pays est généralement arrosé. Donc on ne doit pas se précipiter pour parler de digitalisation. Il faudrait qu’on prenne le temps, qu’on organise les foras qu’il faut, qu’on organise les réunions qu’il faut afin de pouvoir préparer le monde paysan pour qu’il comprenne qu’en fait, il n’y a pas autre chose que de digitaliser. Il est temps, qu’on sache le nombre de producteurs, d’éleveurs, d’acteurs dans le monde rural dans telle ou telle zone.

Doit-on reconstituer le capital semencier ?

C’est une obligation. On ne peut pas s’aventurer chaque année à faire recours à des opérateurs et sans savoir où se trouvent les stocks, et si c’est la qualité. Donc, on est confronté à des problèmes de qualité et de quantité. La reconstitution semencière est une obligation. Après l’indépendance, il y avait des coopératives avec le Président Mamadou Dia à partir de 1962 qui prenaient le soin de régler le problème du capital semencier. A l’époque, avant qu’on arrive au mois de mai, on était sûr qu’il y a 120 000 tonnes disponibles en arachide et des semences concernant les autres espèces, en quantité et en qualité. Aujourd’hui le problème, c’est que on ne distribue que des écrémés. Les certifiés constituent une partie très minime par rapport au capital semencier. Il va falloir maintenant que des pôles semenciers et des développeurs de semences qui avaient été identifiés soient mis en scelle permettant de reconstituer le capital. Je crois que le Sénégal a des dispositions telles que les fermes de l’ANIDA et d’autres fermes semenciers permettant de pouvoir s’occuper de ce capital mais on ne peut pas continuer à servir des écrémés, à attendre le mois d’avril pour aller de marché à marché pour pouvoir trouver des arachides à donner.

Massaër Dia

(Afrik Management/ Mai 2024)

admin
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