La France est championne des réunions en tout genre au sein des entreprises. Cadres et employés consacrent environ 5 heures par semaine à se réunir et selon les structures, cela équivaut à quatre voire sept semaines par an (étude OpinionWay avril 2017).
Celles que l’on appelle aussi des “meetings” pour les rendre plus attractives, sont devenues des rendez-vous complètement vides de sens. Pourquoi ? Tout d’abord, parce qu’elles se tiennent souvent sans objectifs précis. Ce qui fait qu’un quart des salariés ne perçoivent pas l’utilité qui plus lorsqu’elles sont obligatoires. Mais aussi que 40% des participants se concentrent sur leur smartphone ou leur ordinateur pour faire passer le temps. C’est donc un véritable paradoxe dans une société du sprint : seule une réunion sur quatre va aboutir à une prise de décision. Ce qui équivaut à perdre l’équivalent de trois semaines par an à se réunir pour rien ou pas grand chose. CODIR, COMEX, COPIL, brainstorming informels, le jargonnage rivalise d’ingéniosité pour faire passer la pilule de la réunionite aiguë.
L’ennui visible à l’imagerie médicale
Il est possible d’observer en neurosciences que l’attention des participants atteint un seuil critique au bout de 10 minutes en moyenne. A partir de là, l’éveil et le maintien de l’attention vont diminuer considérablement. La faculté de notre esprit à se concentrer sur l’objet de notre présence va s’amoindrir. Elle ne peut plus être exclusive aussi, les participants plongent dans une attention focale et sélective, leur permettant de se mettre en retrait et de se concentrer sur d’autres choses. D’autres participeront aux échanges sous la forme d’un monitoring structuré où ils vont réagir aux propos de chacun.
Le travail étant considéré comme une réalisation de nous-mêmes dans la société, l’ennui s’instaure donc dans les réunions. Certains dirigeants expliquent très bien qu’il est source de créativité et que le temps passé à se réunir ne peut donc qu’être productif à moyen, long terme. C’est d’ailleurs par le vagabondage de sa pensée qu’Isaac Newton a réalisé brillamment ses études scientifiques. D’ailleurs, sur le plan de l’imagerie médicale, les aires de notre système cérébral où se situe le siège de l’ennui serait le même que celui de la création.
Risque de bore-out
Cependant, l’ennui en réunion ne peut être ignoré car il est aussi source de différents troubles psychologiques entraînant la démotivation, la tristesse, la perte de l’estime de soi et l’anxiété. Il signe souvent le début du “bore-out” au travail. Il se traduit par troubles de la mémoire, de l’attention, de la concentration et des fonctions exécutives neurologiques. Risque psychosocial, l’ennui en réunion est donc un manque de stimulation vécue comme une sous-charge de travail. Le bore-out est sa conséquence. En fait, notre cerveau n’aime pas l’ennui car il ne s’arrête jamais, même lors du sommeil où il produit des rêves.
C’est pourquoi, lorsque les réunions s’éternisent ou sont sans fondement, il est possible de voir des participants atteints de somnolence. L’environnement ennuyeux stimule les neurones dotés de récepteurs à l’adénosine, ce qui favorise l’endormissement.
Repenser les réunions
Ce ne sont pas les réunions qui sont inutiles, c’est le manque de sens et d’objectifs qui les rendent ennuyeuses. Il faut donc captiver l’attention en sollicitant l’engagement des participants. En utilisant des données visuelles plutôt que des discours.
Et pour éviter l’ennui, il vaut donc mieux faire une réunion de 20 minutes maximum avec un ordre du jour communiqué à l’avance et une micro coupure de 2 minutes au bout de 10 minutes. Cela renforce le cerveau pour être attentif. Enfin, il faut penser aux tours de paroles pour rendre ce temps d’échanges le plus participatif possible. Tout ceci en limitant à une, le nombre de réunions tous les quinze jours ou deux maximum chaque mois. Chaque réunion donne lieu à une prise de décisions ; facteur de retour du sens. S’agissant des visioconférences, le principe est le même.
Il convient de faire bref et de ne pas excéder 30 minutes. Ne pas excéder le nombre de convives, soit huit maximum pour permettre à tous de s’exprimer brièvement. Et surtout faire simple en se réunissant pour un seul sujet.
Au-delà du coût humain et financier que représentent les réunions, ce temps dégagé revalorise singulièrement chacun des collaborateurs. Ils pourront se concentrer sur leur cœur de métier et ne plus courir dans une fuite du temps qui génère ce sentiment d’inutilité, d’ennui lorsqu’il ne provoque pas de la procrastination pour des tâches initialement prioritaires et remplacées par la réunionite aiguë.
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