Le 2e Sommet africain sur le climat (ACS2), récemment achevé, a marqué un tournant décisif dans la stratégie du continent face aux enjeux climatiques. Loin de la posture traditionnelle de victime de la crise, l’Afrique s’est affirmée comme une force de proposition, avec des annonces financières et des initiatives inédites destinées à attirer des investissements verts.
Le sommet a été le théâtre d’engagements financiers sans précédent. Au total, 150 milliards de dollars vont être mobilisés, dont 50 milliards via le nouveau Pacte africain pour l’innovation climatique (ACIC) et le Fonds africain pour le climat (ACF). Ces montants, auxquels s’ajoutent 100 milliards de dollars promis par les institutions financières du continent, reflètent une volonté claire de s’affranchir de la dépendance à l’aide internationale.
Selon Aissatou Diouf, responsable au sein de l’ONG ENDA Énergie, cette stratégie montre une Afrique qui agit et propose des solutions plutôt que d’attendre l’aide. Alexandre Guibert Lette, directeur exécutif de l’ONG Teranga Lab, confirme ce changement de cap, affirmant que les dirigeants cherchent à “positionner le continent comme un marché d’investissements climatiques”.
Des ambitions prometteuses mais des défis persistants
Si la nouvelle approche est saluée par les experts, elle soulève aussi des questions. Aissatou Diouf et Alexandre Guibert Lette soulignent que le succès de ces initiatives dépend de trois défis majeurs : la transparence dans la gestion des fonds, la capacité à développer des projets concrets, et une meilleure prise en charge de l’adaptation aux changements climatiques, qui reste le “parent pauvre” des financements.
Les experts mettent en garde contre le risque de créer de nouveaux instruments financiers qui ne seraient pas accessibles aux pays les plus vulnérables. La réforme de l’architecture de la dette et le transfert de technologies sont également jugés essentiels pour garantir que ces financements profitent réellement aux communautés locales.
Le Pacte africain, un atout diplomatique pour la COP30
Le Pacte africain pour l’innovation climatique, qui ambitionne de développer 1 000 solutions africaines d’ici 2030, est perçu comme un levier diplomatique majeur. Selon Aissatou Diouf, ce pacte donne à l’Afrique “plus de poids diplomatique et politique” pour défendre ses priorités lors de la COP30 au Brésil. En s’appuyant sur des engagements internes, le continent renforce la crédibilité de ses demandes et peut exiger des engagements concrets de la communauté internationale.
En marge du sommet, le Premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, a annoncé la candidature de son pays pour accueillir la COP32 en 2027, une initiative qui vise à consolider le rôle de l’Afrique sur la scène climatique mondiale.
Le véritable test, pour l’Afrique, sera désormais de transformer ces promesses en réalisations tangibles sur le terrain, prouvant ainsi au monde qu’elle est bien l'”architecte de son propre avenir vert”, comme l’a souligné Wamkele Mene, secrétaire général de la Zlecaf.
Par Babou Landing Diallo
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