Le Salon international de l’aéronautique et de l’espace de Paris-Le Bourget, prévu du 16 au 22 juin 2025, s’ouvre dans un climat mondial en pleine mutation. Ce rendez-vous emblématique de l’industrie aéronautique se déroule à un moment où le secteur est confronté à des recompositions géopolitiques majeures, à une pression croissante sur l’innovation technologique et à une intensification de la compétition pour attirer les talents.

En 2024, l’industrie aéronautique mondiale a généré un chiffre d’affaires estimé à 800 milliards de dollars. Portée par une reprise soutenue de la demande en transport aérien et une dynamique d’innovation accélérée, elle est en route vers un marché évalué à 1 200 milliards de dollars à l’horizon 2030. Cette trajectoire s’appuie notamment sur le développement de nouveaux appareils, l’expansion du trafic aérien mondial et les besoins accrus en maintenance et en services associés.

Réalignement géopolitique et transformation des chaînes d’approvisionnement

La guerre en Ukraine, les tensions croissantes entre les États-Unis, la Chine et la Russie, ainsi que les incertitudes stratégiques ont obligé les principaux acteurs du secteur à repenser leurs chaînes d’approvisionnement. Face aux perturbations causées par les grèves, les délais logistiques et les pénuries de composants critiques, plusieurs industriels occidentaux – parmi lesquels Airbus, Rolls-Royce et Pratt & Whitney – ont accru leurs investissements en Inde. L’objectif est clair : sécuriser une part accrue du marché mondial des composants aéronautiques, qui devrait atteindre 250 milliards de dollars par an d’ici 2033.

Transition énergétique et pari sur l’innovation technologique

Pour répondre à la pression environnementale et aux objectifs de réduction des émissions carbone, l’industrie aéronautique investit massivement dans les technologies dites “propres”. L’aviation à hydrogène est considérée comme une solution d’avenir, bien qu’elle reste confrontée à d’importants obstacles techniques et réglementaires. Airbus ambitionne de lancer un premier avion commercial à hydrogène entre 2040 et 2045, tandis que Boeing prévoit une entrée sur le marché dès les années 2030. En parallèle, le développement de la mobilité aérienne urbaine, avec les eVTOL (véhicules électriques à décollage et atterrissage verticaux), prend forme : des vols commerciaux sont attendus dès 2026 en Floride, marquant un tournant dans la démocratisation de l’aviation électrique.

Une bataille mondiale pour attirer et former les talents

La filière aéronautique est confrontée à une pénurie de main-d’œuvre qualifiée, exacerbée par le vieillissement des effectifs et le départ à la retraite de milliers de techniciens et ingénieurs. Pour y remédier, des initiatives se multiplient, notamment à travers des partenariats entre industriels et établissements d’enseignement technique. En Inde, où le secteur emploie déjà plus de 5 000 personnes, les groupes Raytheon, Airbus et d’autres renforcent leurs activités locales afin de soutenir une production croissante et favoriser le transfert de compétences.

Un Salon stratégique pour dessiner l’avenir de l’aérien

Le Salon de Paris-Le Bourget 2025 s’impose comme un moment stratégique pour les grands décideurs du secteur. Entre les tensions géopolitiques, les impératifs de durabilité et les enjeux de formation, les entreprises doivent faire des choix structurants. Plus qu’une vitrine technologique, ce salon s’annonce comme un révélateur des mutations profondes qui redéfinissent les contours de l’aéronautique mondiale.

Par Zaynab SANGARÈ